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1 octobre 2010 5 01 /10 /octobre /2010 08:43

Un premier roman étonnant, mélangeant fantasy et science-fiction.

Thomas S. Buckell est un jeune auteur qui est né dans les Caraïbes en 1979. Pour l’heure, il a surtout publié une trilogie dont Crystal Rain est le premier tome, un mélange de fantasy et de science-fiction qui lui a valu deux nominations pour le prix Nebula. À noter qu’il a également signé en 2008 un roman dans la franchise du jeu vidéo Halo...

Nanagada à l’aube de la guerre.

Sur la planète Nanagada vivent deux peuples qui se détestent. D’un côté, il y a une nation de pêcheurs, de l’autre les descendants d’Aztèques qui vivent pour la conquête et le sang. Ces derniers se préparent d’ailleurs à déferler chez leurs voisins pour une invasion qui promet d’être massive, brutale et sanglante. L’heure est grave... Chez les Aztèques, Oaxyctl est chargé de retrouver John Debrun, de le torturer et de lui arracher ses secrets. Mais ce dernier est amnésique et particulièrement costaux. Autant dire que la mission d’Oaxyctl est compliquée. Pour John, seul la sécurité et le bonheur de sa famille compte. Devant la menace qui approche, il espère bien avoir le temps de les mettre à l’abri.

Un premier roman plutôt réussi

Crystal Rain est un roman étonnant, commençant avec un récit de fantasy où les Caraïbes rencontrent les Aztèques, puis glissant peu à peu vers la science-fiction au fur et à mesure que les machines apparaissent. La surprise passée, le mélange s’avère plutôt efficace pour ce planet opera qui se lit de bout en bout avec un certain plaisir. Thomas S. Buckell a en plus réussi à rendre son personnage principal, John Debrun, plutôt attachant. Son amnésie, son courage, son passé d’aventurier et son statut de père de famille le rendent profondément humain et sympathique. Une bonne partie du roman tient d’ailleurs sur sa relation avec Oaxyctl, ce dernier étant parvenu à gagner sa confiance, attendant une occasion pour le faire prisonnier... Voilà qui crée un suspense qui nous entraîne de chapitre en chapitre. Quand aux autres personnages, certains donnent du sel au roman, comme ce mystérieux ami de John qui prétend l’avoir connu avant son amnésie, sans oublier quelques monstres aztèques qui auraient sans doute plu à Lovecraft.

Quant à l’auteur, il a fait le choix assumé de privilégier l’aventure et le souffle de son récit au détriment du cadre géopolitique de son univers. Et dans les grandes lignes cela fonctionne plutôt bien, même si l’ensemble n’est pas toujours maîtrisé. On conseillera donc ce roman pour l’exotisme et le dépaysement qu’il offre. En tout cas on suivra désormais avec intérêt les prochains romans de cette nouvelle voix de l’imaginaire.

 

SITE : Actu SF

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29 septembre 2010 3 29 /09 /septembre /2010 16:44

Découvert en France avec Vision aveugle, qui manqua de peu le prix du Cafard 2010 (Egan devait bien finir par l’avoir), le canadien Peter Watts revient au Fleuve Noir avec son premier roman, Starfish (1999), qui exploite ses connaissances en matière de biologie marine. Des débuts en demi-teinte.

 

Vision aveugle ne laissait aucun doute quant au registre de Peter Watts, la hard SF pure, dense et sans concession. Si Starfish ménage davantage son lecteur, l’étendue des connaissances de l’auteur ne manquera pas, une nouvelle fois, de forcer l’admiration. Au menu : anatomie humaine complète, biologie des grands fonds, tectonique et biochimie des plaques, neuroprogrammation, pathologies comportementales, le tout, on l’avoue, à un niveau de précision difficile à évaluer par le novice. Les thèmes de Vision aveugle sont déjà en germe, suggérant peut-être une sorte de trademark de l’auteur : équipage d’humains augmentés et coupés du monde, parano des espaces confinés, immensités hostiles, situation incertaine sur terre, personnage observateur qui n’est pas censé intervenir (mais le fait quand même, par sa simple présence), etc., jusqu’à la qualification des individus adaptés au nouvel environnement de « vampires » (Watts aurait-il pour mission de nous convaincre, à chaque fois, qu’ils existent vraiment ?). Bref, on commence à se sentir agréablement chez soi dans la petite galaxie de l’auteur.

L’histoire se déroule dans un futur relativement proche, au cœur d’une petite station sous-marine de maintenance, située à proximité de la plaque Juan de Fuca (Nord-Ouest américain) ; à l’intersection des plaques continentale et océanique se situe un rift à forte activité, dont certaines compagnies exploitent l’énergie. À force de vivre dans les grands fonds, au sein d’une faune curieuse, les « rifteurs », choisis sur des critères psychologiques précis, développent des comportements inattendus et vraisemblablement induits par la composition étrange de l’eau autour des cheminées de la faille, qui agit sur leur système de respiration artificielle. Inutile d’en dire plus, le pitch est en lui-même une belle promesse de SF, au cahier des charges assez clair.

Problème : la première partie est assez longuette. Les enjeux ne sont finalement pas si clairs, et la psychologie devient vite lourdingue, plombée par des dialogues répétitifs. Le changement fréquent de personnage n’aide pas, et l’on se sent moins en présence d’un exercice de style maîtrisé, que d’une juxtaposition artificielle de points de vue. L’ensemble a l’air d’un patchwork de notes, d’histoires, et de pistes indépendantes les unes des autres. De fait, et l’éditeur le précise, deux chapitres sont la reproduction quasi-identique d’une nouvelle déjà parue en France (Bifrost n°54). Peut-être en va-t-il de même pour le reste ? Toujours est-il que le roman manque d’unité, et ne parvient pas à faire tenir toutes ses idées sur un même plan narratif, rendant parfois l’intrigue très floue.

Heureusement, ce thriller un peu décousu finit par ressembler à quelque chose, lorsqu’au dernier tiers du livre les différentes pistes commencent à converger : psychologie des profondeurs, résonances des mises en quarantaine (sous l’eau, en caisson, en camps), nouvelles formes de vie (aquatiques et gélifiées, pré- et post-humaines), menaces inédites… un pattern général se dessine, et l’intrigue s’emballe, enfin cohérente, laissant à Peter Watts tout le loisir de démontrer la virtuosité technique de son art consommé du dialogue. La fin se dévore d’une traite, dans une sorte de jubilation venant récompenser la patience du lecteur.

 

La conclusion de Starfish n’en est pas vraiment une ; elle met en place les prémisses de ce qui constitue une « trilogie des rifteurs » à venir (mais déjà parue outre-Atlantique). Bancal, inégal, ce premier roman n’en réserve pas moins d’excellents moments, dans lesquels les talents de conteur-ultra-calé-en-sciences de Watts font merveille. On a connu pire.

 

SITE : Cafard cosmique

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29 septembre 2010 3 29 /09 /septembre /2010 16:21

David Peace, Elmore Leonard, Lucarelli … c’est bien joli tout ça. Mais dans le monde du polar, le vrai, le pur et dur, la rentrée, le choc attendu, c’était le Poulpe d’Antoine Chainas. Comment allait-il rentrer dans le moule (ou dans le poulpe ?) ? Laisserait-il Gabriel dans l’état dans lequel il l’avait trouvé en arrivant ? Ou bien dans l’état dans lequel il aurait voulu le trouver en arrivant ? L’odyssée de la poisse est enfin sorti, des milliers de fans ont passé une nuit blanche devant Virgin et la FNAC pour se procurer les premiers exemplaires, et votre serviteur est enfin en mesure de répondre à toutes ces questions angoissées, et angoissantes.

 

chainas poulpe En 2010, déjà, notre poulpinet n’est pas au meilleur de sa forme. Alors imaginez-le en 2030, à soixante-dix ans ! Et Chéryl qui a gardé toutes ses peluches roses ! Dans un monde où on n’existe pas si on n’a pas sa puce sous-cutanée Gabriel est presque un fantôme … Mais, avec sa douce, ils viennent de gagner à la Loterie Nationale Obligatoire. Ils ont gagné une séance de Porn-Incarnation. Pendant quelques minutes, ils seront en osmose parfaite avec deux Omnimorphes spécialistes de la chose, jeunes et beaux.

 

Pendant la séance il se passe quelque chose qui n’aurait jamais dû arriver, Gabriel a senti de l’empathie pour Georgie, son Omnimorphe. Or c’est impossible, les Omnimorphes ne sont pas des « gens », ils n’ont pas de souvenirs, pas d’émotions, ce sont juste de clones, sans âme, et surtout sans droits, propriété de Omnicron Inc. Mais comme la séance lui a donné un coup de jeune, pour exister de nouveau, Gabriel décide d’aller voir ce qu’il se passe du côté de clones, et de comprendre pourquoi ils se font tous dessouder dernièrement …

 

L’attente, donc, était grande, immense même. Le résultat dépasse toutes les espérances. Ni plus ni moins. Une histoire indéniablement à la Chainas, des thématiques Chainas qui viennent parfaitement coller à celles du poulpe (ce qui, tout de même, n’était pas forcément gagné d’avance). Une intrigue sans la moindre faille, qui fonctionne en hommage à quelques grands de la SF (de façon plus ou moins explicite), de la baston, du noir bien noir, de l’amour, de l’émotion, des clins d’œil …

 

Et une nouveauté : beaucoup d’humour. On sentait bien, derrière la noirceur de ses romans précédents, la jubilation de l’auteur. Ce poulpe lui offre l’occasion de la laisser éclater, ouvertement. Et ça donne ça, entre autres exemples :

 

« Bande annonce :

Ne ratez pas ce soir sur l’ensemble du réseau France Internet notre grand débat intitulé : « Omnimorphe, le don de la vie ? ». En compagnie des meilleurs spécialistes, Marin Ledun (secteur Haute Technologie), Jérôme Leroy (secteur Prospective Appliquée) et Caryl Férey (secteur Sensibilité du Pied Droit), nous débattrons des enjeux politiques, financiers et éthiques de cette nouvelle forme de divertissement qui a, en quelques années, révolutionné l’industrie des loisirs. France Internet, et le monde bouge encore. Mention Légale : France Internet est un groupe de mission de service public obligatoire. »

 

Et donc le lecteur jubile de la première à la dernière ligne. Un très grand poulpe, et un excellent Chainas.

 

Jeanjean aussi a aimé, vous aimerez, promis, juré.

 

SITE : Actu du noir

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29 septembre 2010 3 29 /09 /septembre /2010 16:19

A la rentrée de janvier, il y a eu Ingrid Astier ; pour celle de septembre, la nouvelle venue à la série noire s’appelle Elsa Marpeau. Comme sa tout juste aînée (du moins en publication) elle nous amène découvrir un recoin bien sombre et peu connu, de la capitale. Après la Seine et la brigade fluviale de Quai des enfers, voici l’hôpital Lariboisière, théâtre de son roman : Les yeux des morts.

 

marpeau Frank Delorme, 18 ans, toxicomane, est retrouvé dans un hall d’immeuble la gorge tranchée. Cela pourrait ressembler à une vengeance de dealer. Mais Gabriel Ilinski, technicien de scène de crime repère immédiatement de petits détails qui ne cadrent pas avec cette hypothèse, et convainc la commissaire en charge de l’affaire de le laisser, une fois de plus, mener sa propre enquête. Parce que Gabriel ne peut s’empêcher de se sentir responsable de ces morts qu’il voit tout les jours. Ces morts qui l’habitent et l’empêchent de trouver le repos. Il découvre que peu de temps avant sa mort Frank avait été admis aux urgences de l’hôpital Lariboisière. Un monde à part et des êtres qui vivent dans une réalité que le reste de la ville et du pays ne veulent surtout pas connaître. Un monde que Gabriel va découvrir.

 

Il ne manque pas grand-chose à ce premier roman pour être une réussite totale. Débarrassons-nous donc tout de suite des quelques légères réticences. Elles tiennent essentiellement à un certain manque de tension. Si on est passionné par le contexte décrit, on ne tremble guère pour le personnage principal, sauf lors d’une ou deux scènes très réussies. On est même plus intéressé par la description des lieux (passionnante) que par la découverte du meurtrier. Peut-être parce que, contrairement aux recommandations de Tonton Alfred, le méchant ne fait pas aussi peur qu’il ne le devrait (c’est lui qui disait que pour qu’un film policier soit réussi il fallait que le méchant soit parfait).

 

Fin des restrictions. Tout le reste est passionnant. A commencer par l’écriture, sèche, précise, qui claque comme … comme du Dominique Manotti par exemple. Le lecteur est littéralement emporté dès le premier paragraphe par son rythme.

 

Puis il y a le personnage de Gabriel, qu’on ne peut s’empêcher d’aimer, têtu, sensible, agaçant, névrosé, généreux … humain en bref. Un personnage à la Robin Cook (le vrai, l’anglais, pas celui qui débite du thriller médical au km, même si on est … à l’hôpital). Alors certes, on n’est pas au niveau de Dora Suarez (par ailleurs cité en exergue), mais on retrouve cette empathie avec les morts, avec ceux qui ont souffert, ceux dont tous le monde se fout, qui sont oublié avant d’être froids.

 

Et pour finir, quelle superbe et saisissante description de ce monde des urgences ! On vit avec le personnel médical, on ressent viscéralement l’urgence, la concentration, la tension, le besoin de sauver des vie, et en même temps le désespoir de savoir qu’on en rejette une bonne partie dehors, où les « pansements » qu’on a posé ne vont pas tarder à craquer de nouveau. Ces urgences où, faute de pouvoir soigner les causes, on soigne les effets, encore et encore, comme on écoperait la mer avec une écumoire. Ces urgences, rendez-vous de toute la misère que nous ne voulons pas voir valent à elle seule la découverte de cet auteur.

 

L’avis de Jeanjean, un peu moins convaincu que moi (il faut bien qu’on ne soit pas complètement d’accord de temps en temps, bien que sur ce roman nos divergences soient minimes).

 

Et vous pouvez compléter avec une interview sur bibliosurf.

 

SITE : Actu du noir

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29 septembre 2010 3 29 /09 /septembre /2010 16:17

De retour de la rencontre avec David Peace, passionnante (je vous en reparler d’ici peu) une diversion fort bienvenue.

 

Les duettistes surdoués du polar reviennent. Après Ping-Pong et Tohu-Bohu, revoici pour notre plus grand plaisir Jean-Bernard Pouy et Marc Villard dans un mano-a-mano éblouissant de maîtrise et d’apparente facilité. Leur nouveau spectacle, cuvée 2010, s’appelle Zigzag.

 

Commençons par un averissement. Peut-être que, comme moi, vous avez l’intention de déguster ces nouvelles une à une, à l’occasion. Ben ça marche pas. Zigzag c’est comme les noix de cajou à l’apéro, ou le paquet d’amandes enrobées de chocolat. On croit qu’on va pouvoir n’en manger qu’une, et qu’on saura s’arrêter. Erreur, sans s’en rendre compte, tout le paquet y passe. Là c’est pareil. Sauf que ça fait pas grossir, ça rend heureux, et peut-être même un peu moins bête.

 

Pouy Villard Le principe est un peu différent du précédent. Cette fois chaque auteur a fait une liste de ses thèmes de prédilection (10 chacun), les a passé à l’autre, à sa charge d’écrire une nouvelle. Nous avons donc :

Le foot, Barbès, la vie de famille, les immigrés, les flics pourris, les tueurs à gage, le jazz, la drogue, les éducateurs, les Halles proposés par Marc Villard, à traiter donc Jean-Bernard Pouy.

Et le vélo, la Bretagne, le cinéma expérimental, les libertaires, les citations philosophiques, la vache, le rock and roll, la peinture, le train, la patate, proposés par Jean-Bernard Pouy à traiter par Marc Villard.

 

Résultat, 20 moments de bonheur. Villard reste Villard tout en jouant à être Pouy, Pouy fait semblant d’être Villard pour redevenir lui-même dans une ultime pirouette. Les thèmes se télescopent, se répondent, se mélangent.

 

Et oui, se mélangent parce que le lecteur attentif ne pourra pas ne pas remarquer que lorsqu’il traite de la vache ou de la patate (thématiques JBP) MV y met aussi une pincée de drogue (thématique MV), ou que lorsque JBP parle des Halles (thème MV), il y met aussi pas mal de peinture, et de libertaires (thèmes JBP) … Vous suivez ? Non ? c’est pas grave.

 

Faites-moi confiance, le spectacle est rodé, minuté. Ca part dans tous les sens, on en prend plein les neurones. On sourit beaucoup, on bade devant autant de maestria, et on se garde au coin de l’oreille quelques pépites pêchées ici ou là, comme la diatribe hallucinante et pourtant très logique d’un poivrot dans un commissariat (je vous laisse découvrir le poivrot et le commissariat) et quelques pirouettes finales éblouissantes.

 

Ceci dit, et comme je le disais dans ma chronique de leur précédent spectacle, si j’essayais d’être écrivain, j’aurai salement les crocs de voir ces deux affreux s’amuser à pondre avec autant de facilité apparente et de bonheur des nouvelles aussi épatantes juste pour rire …

 

Convaincus ?

 

SITE : Actu du noir

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29 septembre 2010 3 29 /09 /septembre /2010 16:14

Vous ne pouvez pas savoir le plaisir que j’ai éprouvé à ouvrir Signé Mountain de Peter Corris. Parce que comme le suggère le titre fort littéraire de ma chronique, Peter Corris et son Cliff Hardy ont été parmi les premiers à l’accueillir dans le monde merveilleux du polar. Ni les meilleurs, ni les plus originaux, mais avec Hillerman, Ellroy, Montalban et un ou deux autres, un des premiers que j’ai lus et appréciés.

 

Corris Comme son auteur Cliff Hardy est australien, de Sydney. Il est privé, un vrai, un hard-boiled pur et dur, dans la grande tradition Bogart. Il picole, sait se battre, raconte à la première personne, a le sens de la formule, plait au femmes mais vit seul … Un vrai vous dis-je.

 

Tout commence quand un de ses amis, loueur de voitures, l’embauche pour démasquer l’équipe qui lui a déjà volé 4 voitures. Or parmi les voleurs déguisés et maquillés qui ont loué un véhicule sous un faux nom, Cliff reconnaît une de ses connaissances de bar : Bill Mountain, écrivain raté, alcoolique accompli, qui gagne (fort bien) sa vie en écrivant des merdes pour la télé. La suite ne sera qu’une longue poursuite, derrière un looser qui plonge toujours plus loin dans la folie.

 

Essayons d’être objectif … pas grand-chose d’original, rien de révolutionnaire dans ce roman. Le plus grand dépaysement vient du lieu, Sydney, où le privé est quand même plus rare qu’à Los Angeles, New York ou Paris. Sinon sur une intrigue somme toute assez classique, proche (pour le point de départ) de celle du dernier baiser de l’immense James Crumley (un privé court après un écrivain en panne d’inspiration), et une histoire qui fonctionne, avec un personnage comme les aiment les amateurs de polar, des rebondissements, de la castagne … et le plaisir de retrouver un personnage perdu de vue depuis longtemps, de se couler dans cette histoire comme dans des pantoufles certes un peu usées, mais ô combien confortables.

 

Parce qu’on ne peut pas ne lire que du David Peace, que du génial, que du qui secoue, et qu’un bon polar des familles, avec un privé dur à cuire dans la tradition, écrit par un bon écrivain qui maîtrise parfaitement son sujet, ça fait aussi du bien de temps en temps.

 

Allez, quelques réflexions de Cliff, qui font partie du charme de l’ensemble :

 

« On a échangé une poignée de main, si longue que j’ai bien cru qu’il voulait me léguer la sienne »

« avec des cheveux plus sel que poivre, et une calvitie si galopante que c’était à se demander si son dernier cheveu aurait le temps de blanchir avant de tomber. »

 

C’était donc ma madeleine à moi. Une de mes madeleines.

 

SITE : Actu du noir

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29 septembre 2010 3 29 /09 /septembre /2010 16:04

Une deuxième nouveauté en septembre à la série noire avec Declan Hughes et son Coup de sang qui vient confirmer la vitalité du polar irlandais.


Hughes Ed Loy a quitté Dublin à 18 ans. Il s’est installé et a fait sa vie à Los Angeles où il est devenu privé. Aujourd’hui, il est de retour en Irlande, pour enterrer sa mère. Il retrouve une ville qu’il ne connaît pas : le boom économique a tout changé, les grues sont partout, des fortunes inimaginables se sont construites en quelques années et tout le monde semble avoir oublié le passé. Par désœuvrement, il accepte de chercher le mari de Linda Dawson, une amie d’enfance. Une quête qui va l’amener à fouiller dans les coulisses de la nouvelle prospérité, et à exhumer un passé qui ne se laisse pas oublier si facilement.


Du classique, du solide, du sûr. Un privé, un point de départ archi connu (un privé part à la recherche du mari / de la femme disparu-e-), pour une intrigue solide, de beaux personnages, de l’émotion, de l’action, des coups de théâtre, des affreux convaincants, une belle écriture … cela serait déjà suffisant à faire de ce Coup de sang un bon polar dans la tradition.

 

Mais ce n’est pas tout. En prime il y a l’Irlande du boom. Celle décrite par Ken Bruen ou Hugo Hamilton. Celle qui se perd dans les mirages de la consommation à tout crin, dans le tourbillon de l’argent facile, et de l’argent roi. Celle qui ne veut pas voir qu’à côté du clinquant, il y a ceux qui sont restés en rade, et qui, par contraste et parce qu’ils sont plus seuls que jamais, sont dans une situation encore pire qu’avant.

 

« Après tout, il y avait de l’argent dans ces rues, et les personnes qui en avaient le portaient sur leur dos, autour de leurs poignets et de leur cou. Pourquoi pas dans la bouche aussi ? Quel est l’intérêt d’avoir de l’argent si personne ne savait que vous en aviez ? Pendant trop longtemps, les Irlandais avaient eu honte de leurs fonds de culotte troués. Plus personne n’avait le droit de penser ainsi, et même si cela impliquait un carnaval de vulgarité et d’avidité ostentatoire,  eh bien, n’avions nous pas attendu ce moment suffisamment longtemps ? […]

Dublin ressemblait maintenant à l’importe quelle autre ville. Je suppose que c’était le but : à un moment de notre histoire, nous avions essayé de défendre une identité irlandaise unique en nous isolant du monde extérieur. […]

Après avoir tenu à prouver que l’Irlande n’était pas une colonie appelée Grande-Bretagne de l’Ouest, nous étions désormais optimistes quand à notre recolonisation, résignés à notre destiné de 51° état des USA. »

 

Pour finir il y a la dimension politique du roman. Celle, dans la plus pure tradition du roman noir des origines qui parle de corruption, des liens entre crime et le monde politique. Un lien et une corruption inévitable dans un pays qui s’est enrichi si vite, et où la construction explose, tant bâtiment, pègre, politiques et pot de vin font bon ménage.

 

En résumé, un bon polar dans la tradition qui se révèle, en plus, un très bon roman noir.

 

SITE : Actu du noir

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29 septembre 2010 3 29 /09 /septembre /2010 15:59

Je ne sais pas si vous vous souvenez, mais j’avais été déçu par le dernier Elmore Leonard, Hitler’s day. Road dogs prouve de façon éclatante que ce ne fut qu’un accident de parcours, un tout petit accident dans un immense parcours.

 

Leonard road Jack Foley, la braqueur de banque, tombeur de ces dames … est tombé. Le voilà en prison en Floride, enfermé pour 30 ans. La fin d'une belle carrière ? Non, grâce à Cundo Rey, truand cubain plein de fric qui se prend d'amitié pour lui, et va jusqu'à lui payer les services de son avocate, une as du barreau, qui réussit à faire réduire sa peine. Résultat, Jack se retrouve dehors avant son bienfaiteur, qui lui demande d'aller l'attendre à Venice Beach, Los Angeles Californie.

 

C'est là que Jack fait la connaissance de Dawn Navarro, maîtresse de Cundo, voyante, arnaqueuse … et pressée de mettre la main sur la magot du petit cubain. Celle-ci voit en Foley le parfait partenaire pour cette opération … Mais Jack peut-il lui faire confiance ? Et comment savoir ce que Cundo Rey a derrière la tête ? Qui mène vraiment la danse dans cette histoire ? Heureusement Jack Foley est cool et il a de la ressource.

 

Du pur Elmore Leonard au mieux de sa forme. Un personnage principal elmorien en diable (on peut dire elmorien ?). Cool comme ce n'est pas permis, maître de lui et de toutes les situations, même les plus tendues. Des dialogues époustouflants, une maîtrise de l'intrigue et de l'écriture magistrale … Bref tout ce qu'on aime.

Ajoutez quelques clins d’œil, des références à des romans passés, et vous avez ce Road Dogs, variation du Maître sur le thème archi-connu de la femme fatale et du triangle amoureux. Une variation qui prouve que, finalement, le talent change en or les clichés les plus rebattus.

 

Continuez le plus longtemps possible monsieur Leonard.

 

SITE : Actu du noir

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29 septembre 2010 3 29 /09 /septembre /2010 15:53

Parmi les pays nordiques, la Finlande ne nous est pas forcément le plus connu. Voici une manière de le découvrir, en hiver, durant la semaine du 24 décembre au 1er janvier. Ce roman d’enquête baigne dans un troublant climat psychologique, ce qui le rend d’autant plus intense. L’état d’esprit du policier Kimmo Joentaa constitue le principal atout de cette histoire. Marqué par son drame personnel, il fait preuve d’empathie envers tous, collègues ou témoins, proches de victimes. Seule la belle Larissa (ce n’est pas son vrai prénom) échappe à sa perspicacité, bien qu’ils deviennent intimes. Dans l’ombre, on découvre par petites touches une autre personne, jouant un rôle essentiel. Les portraits de chacun des intervenants de l’affaire sont joliment précis et nuancés. Un suspense riche en finesse, à l’ambiance véritablement prenante.

 

SITE : action-suspense

 


 

En étant de garde au commissariat un 24 décembre, le commissaire Kimmo Joentaa pensait passer un Noël paisible. C'était sans compter sur l'irruption d'une jeune prostituée, venue déposer plainte contre l'un de ses clients, dont elle répète le nom - faute de donner le sien : Ari Pekka Sorajärvi. A priori, la séance se serait mal passée, il aurait été brutal, la "professionnelle" lui aurait cassé le nez et serait partie avec son permis de conduire. Finalement, celle-ci se rétracte et s'en va. Affaire classée. Kimmo pense en avoir fini, et part chez lui, où il vit seul depuis le décès de son épouse. Soudain, quelqu'un sonne à la porte : la jeune préposée aux amours tarifées - qui se fait appeler Larissa - a trouvé l'adresse du policier et souhaitait le revoir, tout de suite... Mais, bientôt, le commissaire sera appelé sur une autre affaire : on vient de découvrir le cadavre d'un médecin légiste dans la forêt, des skis de fond aux pieds. Un mort en appelle un autre puisqu'un fabricant de mannequins pour le cinéma est presque simultanément assassiné. Coïncidence, les deux victimes venaient de participer à un talk-show humoristique présenté par Kai-Petteri Hämäläinen, "l'homme le plus célèbre de Finlande". Celui-ci se fait alors poignarder entre le hall et la cafétéria de la chaîne, mais survit à cette attaque... On n'en dira pas plus sur l'épatant L'hiver des lions, troisième roman traduit de Jan Costin Wagner, nouveau représentant du polar nordique (même s'il est allemand...). Sur une trame classique, ce trentenaire extrêmement doué impose un ton mortifère et une manière de se détourner de l'histoire pour mieux la traiter. Le roman noir de la rentrée.  

 

SITE : l'express


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29 septembre 2010 3 29 /09 /septembre /2010 13:30

Chicago, 1893. Alors que la ville s'habille de lumière et vit au rythme des festivités de l'exposition universelle, des jeunes filles sans défense disparaissent mystérieusement et des corps apparaissent sur les rives boueuses du fleuve. Emily, jeune journaliste sans grande expérience, mais pleine de fougue et de ressources, est bien décidée à prouver son talent au grand Joseph Pulitzer en levant le voile sur cet étrange affaire. Derrière le clinquant et les paillettes, c'est un monde sombre et malsain qu'elle va découvrir, au péril de sa vie ...

C'est sur les rives boueuses du lacMichigan, qu'est repêché le corps apparemment sans vie d'une jeune femme qui frappée d'amnésie est internée dans un asile. Tandis qu'une double menace pèse sur elle, la jeune Anna devra se battre pour retrouver la mémoire et sa liberté. Sans foi, ni loi ! Derrière les paillettes se révèle la noirceur d'hommes barbares s'attaquant à une jeune femme, dont la seule arme est la force de son instinct de survie.

"Dans l'ombre de la ville" est un récit captivant à l'atmosphère enveloppante. C'est à une plongée haletante dans le Chicago de l'exposition universelle de la fin du dix-neuvième siècle, que nous invite à assister l'auteur James Conan. A travers les lignes de ce roman, on ressent parfaitement bien, l'atmosphère de cette époque-là. D'un côté, le faste et l'ambiance colorée des salons particuliers de la riche Amérique et de l'autre, tout un monde souterrain sinistre, baignant entre prostitution, pornographie et violence entre groupes ethniques rivaux.

J'ai bien aimé la lecture de ce suspense sombre, qui allie détails historiques et mystère fascinant. Une intrigue serrée qui donne au lecteur un léger frisson d'angoisse dès les premières pages, palpitant à souhait ! On suit avec grand intérêt, ces fameux "meisters" présentés dans le livre comme une guilde de maîtres bouchers opérant à partir des abattoirs de la ville. Ces derniers étant infiltrés par un noyau dur d'individus impies et cruels, qui contrôlent le commerce de la pornographie et par là-même, la vie et le destin de tant d'immigrants de Chicago.

Passionnant de bout en bout, il n'y a dans ce livre, aucune descriptions heurtantes, c'est une histoire pour tous publics, distillant entre les lignes, un certain parfum à l'eau de rose. Je vous laisse découvrir, ce très joli roman où derrière le nom de plume de James Conanb se cachent deux auteurs chevronnés : Helen Rappaport historienne et spécialiste de l'histoire des femmes au 19ème siècle et William Horwood - ancien chroniqueur au Daily Mail. On suit avec passion, les aventures de ces deux jeunes femmes, comme un bon vieux film en noir et blanc, au temps du cinéma muet, agrémenté par quelques notes de piano.
8/10.

 

 

SITE : Noir suspense

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