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18 août 2010 3 18 /08 /août /2010 14:30

De temps en temps, quoi de mieux pour se mettre de bonne humeur qu’un vieux Leonard ou McBain qu’on avait sous le coude. Coup de bol, j’avais Paiement cash d’Elmore Leonard qui trainait par là …

 

Leonard Cash Mitchell a tout pour être heureux. Ancien ouvrier, il a gagné pas mal d’argent grâce à un brevet et a pu monter sa propre usine de production de pièces pour l’automobile (nous sommes à Detroit). Après 22 ans de mariage, il aime encore sa femme. Mais, mais … Mitchell a une affaire avec une gamine qui a l’âge de sa fille. Et trois truands, beaucoup moins intelligents qu’ils ne le pensent, croient tenir là le pigeon idéal à plumer. Ils décident donc de le faire chanter. Mauvaise pioche. Mitchell n’est pas du tout du style à se laisser faire. Mais il va devoir se méfier, parce que si les trois affreux sont bêtes, ils sont aussi méchants …

 

Du pur Elmore Leonard. Plaisir assuré, histoire aux petits oignons, dialogues parfaits, écriture fluide … 300 pages de pur plaisir, sans se faire mal au crâne, sans que jamais la tension ou l’intérêt ne baisse d’un cran. Ca paraît tellement facile d’écrire un polar quand on lit Elmore Leonard … A se demander pourquoi les autres auteurs ne font pas comme lui. Et comment on peut trouver sur le marché autant de machins mal écrits, mal construits, prétentieux, indigestes …

 

Faut croire que ce n’est pas si facile que ça … Donc voilà, si vous voulez vous faire plaisir en lisant un bon roman, c’est facile : vous allez dans la librairie/bibliothèque la plus proche de chez vous, vous allez à « polar », lettre « L », « Leonard », vous fermez les yeux, vous piochez au hasard. Merci à Rivages de remettre de tels bijoux dans les rayons.

 

SITE : Actu du noir

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18 août 2010 3 18 /08 /août /2010 14:25

La confrontation Orient-Occident vue par Nury Vittachi.

J’avais découvert Nury Vittachi et son énergumène, C.F. Wong il y a quelques années avec Le maître de fengshui perd le nord. Hilarant. Puis les éditeurs avaient traduit un recueil de nouvelles très décevant, et je l’avais oublié. Jusqu’à ce que j’aperçoive Le maître de fengshui est à l’ouest sur les tables de ma librairie de prédilection, et que je décide de lui redonner une chance. Bien m’en a pris !

 

Vittachi Les affaires vont mal, très mal pour C. F. Wong, maître de fengshui de Singapour. Aussi, malgré son mépris et sa crainte de l'Occident est-il obligé d'accepter une mission bien inhabituelle : Arranger les salons d'un A380 plus que luxueux, destiné à devenir un véritable centre d'affaires volant et … analyser la disposition d'un certain palais de Buckingham. En effet, l'avion est en partance de Hong Kong pour Londres, et depuis quelques temps la Famille Anglaise subit de sérieux revers. Toute aide serait donc la bienvenue. Bien entendu, il serait grassement payé. Tout cela semble bel et bon, mais heureusement, très rapidement, les grains de sables vont enrayer la machine …

 

Commençons par un avertissement. Si vous cherchez dans un polar une intrigue retorse, avec des déductions savantes et une progression millimétrée, passez votre chemin. Ceux qui n’aiment pas diront sans doute que l’histoire est complètement irréaliste, incohérence, pas un poil crédible. Arbaracatrabrantesque ou quelque chose dans le genre.

 

Ceux qui aiment (dont moi), la trouveront tout simplement loufoque. Et surtout, on se marre à toutes les pages. Si Nury Vittachi n'est pas un génie de l'intrigue, c'est un magicien du dialogue et un maître es situations. La confrontation, vue par ses yeux, entre Orient et Occident est absolument hilarante, on éclate régulièrement de rire, et ça fait un bien fou. A ne rater donc sous aucun prétexte.

 

Le comique s’appuie sur une présentation burlesque très réussie de certaines actions, et surtout sur l’incompréhension totale entre Wong, vieux chinois comprenant mal l’anglais, et encore plus mal notre société, et son employée (jeune australienne gentille mais pas forcément lumineuse) et surtout les envoyés de la Queen. Ce qui donne ce genre de dialogue :

 

« au décès de la Princesse de Galles, entre autres choses.

- La Princesse de Galles est morte elle aussi ?

- Comment ça elle aussi ?

- Eh bien, Lady Diana est morte dans un accident de voiture.

- Oh, je vois, non … Il ne s’agit pas d’une autre princesse. La princesse de Galles est le titre officiel - de Lady Diana … Euh … La Princesse Diana, pour être correct.

- C’était une princesse galloise ?

- Non, une roturière anglaise. Mais elle portait le tire de Princesse de Galles

Wong estima qu’il valait mieux ne pas essayer de comprendre. »

 

Ou

 

« Les reines sont Regina. Les rois sont Rex.

En entendant cela, les sourcils du maître de fengshui se froncèrent. « Mais Joyce m’a dit que Rex voulait dire chien en Angleterre. »

Manks réfléchit. « C’est vrai, d’une certaine façon. En occident, le mot latin Rex est utiliser pour baptiser les chiens, mais cela veut aussi dire Roi. »

Wong secoua lentement la tête. Pas étonnant que la civilisation occidentale soit dans une état aussi lamentable. Aucun sens des convenances. »

 

Voilà, et des comme ça il y en a des wagons.

 

N’allez cependant pas croire que la charge est à sens unique. Si les représentants de la Royauté en particulier, et les occidentaux en général ne sont pas épargnés, Wong non plus : cupide, égoïste, rapace, férocement individualiste, bourré de préjugés … Terriblement humain, et très drôle.

 

SITE : Actu du noir

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30 juin 2010 3 30 /06 /juin /2010 15:07

Pour commencer, je ferai un détour par l’incontournable Bragelonne qui, après nous avoir offert Patrick Rothfuss et son fameux Nom du vent, récidive rayon découvertes avec L’homme Rune premier volet du Cycle des Démons. Dans le monde occidental la nuit est souvent associée à la terreur. Pour son premier roman publié l’américain Peter V. Brett a su habilement exploiter cette angoisse en imaginant un univers pseudo médiéval proche de notre monde où les humains deviennent à la nuit tombée les proies de créatures immortelles et magiques : les démons, qu’ils soient de la pierre, de l’air, du feu, etc… Pour leur échapper les hommes se terrent la nuit venue dans leurs habitations dont portes et fenêtres sont protégées par un maillage de runes magiques qui empêchent les démons d’approcher. Du moins, la plupart du temps… car, lorsque l’une de ces runes présentent des marques de faiblesse, c’est la curée assurée. Après avoir campé ce décor inquiétant à souhait digne des Oiseaux d’Hitchcock ou de La Nuit des morts vivants de Romero (la première version en noir et blanc, bien entendu) l’auteur y introduit trois personnages dont nous sommes invités à suivre le destin douloureux. Trois enfants qui ne veulent pas se résoudre à la vie de cloportes à laquelle sont réduits leurs congénères, sortant et travaillant le jour, se cachant la nuit et trouvant tout à fait normal que leur famille et leur entourage succombent aux exactions des démons.

 

Arlen de Val Tibbet, tout d’abord, jeune garçon doué d’un talent inné pour dessiner les runes qui éloignent les démons. Ecœuré par la lâcheté de son père il partira sur les routes, la nuit, afin de découvrir ce qui se cache derrière l’horizon. Puis Leesha, la jeune fille maltraitée par sa mère et diffamée par son fiancé, qui rêve par-dessus tout de conquérir son indépendance, même si pour cela il lui faut affronter les diaboliques créatures de la nuit. Et enfin Rojer, un enfant de trois ans, unique survivant du massacre de sa famille par les démons. Tous trois trouvent sur leur chemin une aide indispensable pour les aider à survivre. Dans le cas d’Arlen ce sera Ragen le Messager, qui le recueillera sur la route et l’emmènera avec lui dans la cité de Miln afin que le jeune garçon suive à son tour le dur apprentissage de la caste très fermée de ces courageux voyageurs. Pour Leesha, il s’agira de Bruna, la Cueilleuse d’Herbes, bien vieille mais surtout un peu sorcière, qui l’aidera à sortir des jupons souvent relevés de sa mère. Enfin Rojer aura la chance de se lier d’amitié avec Arrick le Jongleur, qui le protègera durant pas mal de temps des attaques des démons, tout aussi bien que le violon dont il a appris à jouer en dépit de sa main mutilée. Dans ce premier tome du Cycle des Démons nous suivrons la croissance de ces trois enfants, nous apprendrons à triompher avec eux de problèmes de la vie quotidienne souvent semblables à ceux que nous rencontrons, tout en essayant de comprendre comment chacun d’entre eux finira par acquérir une puissance qui lui est propre en essayant de résoudre le problème des démons. Un problème dont ils détiennent chacun une solution qui pourrait bien se cacher dans ces fameuses vieilles runes, dont certains prétendent qu’il ne s’agit que d’une légende, et qui auraient le pouvoir de repousser les démons, et même de les détruire.

 

Devenu la coqueluche des éditeurs qui se sont battus à travers le monde pour acquérir les droits de ce livre, ce récit trouve sa genèse dans une histoire rédigée pour un concours d’écriture sur la Fantasy. Un récit retraçant la vie du jeune Arlen qui avait soif de voyage, mais qui ne pouvait pas s’éloigner à plus d’un jour de sa maison, sous peine d’être tué par les démons. Continuée plus tard dans tous les endroits possibles, et en particulier durant les trajets conduisant Peter Brett à son travail, cette histoire devint ce roman captivant aux multiples péripéties où la peur occupe une part prépondérante. Une peur qui sert d’exutoire à l’auteur pour retranscrire les angoisses du peuple américain après l’attentat du 11 septembre et face à la menace du terrorisme répandue à travers le monde. Un livre qu’il a écrit en s’inspirant de ses nombreuses lectures de jeunesse parmi lesquelles figurent la plupart des grands noms de la Fantasy tels que J.R.R. Tolkien, Robert Jordan, Terry Brooks, David Farland, R.A. Salvatore, Phillip Pullman ou George R.R. Martin. Une série pour laquelle Peter V. Brett a signé un contrat en trois tomes, mais qu’il espère bien prolonger jusqu’à cinq volumes afin de mieux exploiter la dynamique romanesque des divers personnages qu’il a inventés.

 

Tout d’abord, bien entendu du trio du premier opus, mais aussi d’autres protagonistes tout aussi charismatiques, comme ceux que nous découvrirons dans le second volume du cycle, The desert spear, Jardir, le leader du désert, l’ami d’Arlen, et Renna Tanner, la jeune fille promise au même Arlen dans un mariage arrangé lorsqu’il était enfant, qui aura sa propre influence sur la guerre menée contre les démons. On le voit, Peter V. Brett n’est pas en manque d’imagination pour la suite de cette brillante série que nous avons la chance de découvrir en France avec l’ajout d’un prologue, inédit dans les versions originales, qui est en fait la transcription de la fameuse nouvelle écrite pour le concours d’écriture qui fut à la base du roman. Enfin, n’oublions pas de saluer la saisissant couverture de Miguel Coimbra qui reproduit à merveille l’ambiance si délicieusement oppressante du livre, et de noter que le réalisateur/producteur Paul W.S Anderson (voir le récent Resident Evil : Afterlife) et son compère Jeremy Bolt ont acquis les droits du roman dont ils nous promettent une prochaine version cinématographique qu’ils nous annoncent digne des meilleurs réalisations du genre. A noter que pour parfaire la lecture on peut se tourner vers diverses interviews de l’auteur :

► « Interview à propose de L’homme rune » in Neverland 1, le magazine gratuit proposé depuis septembre par les éditions Bragelonne.

► « Peter V. Brett : la Fantasy dans la peau » interview par Emmanuel Beiramar sur le site www.fantasy.fr,

► « Un entretien avec Peter V. Brett » par Altan sur le site www.elbakin.net

► « Un nouvel entretien avec Peter V. Brett ! » par Julie, toujours sur www.elbakin.net

 

SITE : Actu SF

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30 juin 2010 3 30 /06 /juin /2010 14:03

Une multitude de royaumes prospèrent sur la Terre plate, affichant toutes les stigmates de la décadence : richesse tapageuse, misère fort réjouissante au regard, cruauté gratuite, luxure et concupiscence à tous les étages. Souvent, ils s’affrontent, des conflits progressant comme un feu de paille sous le souffle de souverains conquérants. Sous des cieux habités de dieux aux abonnés absents, les hommes vivent et meurent dans l’insatisfaction permanente. Une constante demeure toutefois : l’humanité offre aux démons une source intarissable de distractions. De cette époque témoignent un faisceau de contes réunis ici en deux épais volumes et intitulés Le Dit de la Terre plate.

 

Figurent au sommaire des deux livres

 

* Le Maître des Ténèbres

* Le Maître de la Mort

* Le Maître des Illusions

* La Maîtresse des Délires

* Les Sortilèges de la Nuit

 

À l’orée des années 1980, OPTA puis Presses-Pocket entament l’édition du Dit de la Terre plate, une des pièces maîtresses de l’œuvre de l’auteur britannique Tanith Lee. Rude épreuve pour les lecteurs de l’époque, accoutumés à son autre cycle La Saga d’Uasti, que cette série de contes aussi sucrés et entêtants qu’une armoire normande parfumée à l’Angel de Thierry Mugler. Sévère punition également que la lecture des deux forts volumes – deux vrais briseurs d’étagères – réédités par Mnémos, éditeur fort actif en ce début d’année 2010.

 

À l’instar de l’âge hyborien, Le Dit de la Terre plate se déroule à une époque antique si lointaine qu’elle en est devenue mythique. À la fois aire géographique clairement délimitée, trois mondes superposés – un Ciel, une Terre, un Enfer –, et ère temporelle dilatée dans une impression d’éternité figée, la Terre plate procure un vaste décor à une succession de contes empruntant autant à l’Orient – on pense plus d’une fois aux Mille et Une Nuits – qu’à des auteurs plus contemporains, tels Charles Duits ou Roger Zelazny. Même si ce parallèle apparaît totalement injustifié, une même communauté d’inspiration semble pourtant guider leurs plumes.

Dans cette période antédiluvienne, les monarques évidemment mégalomanes s’entichent de chimères pendant que les démons s’amusent de leurs vaines gesticulations. Malédiction, extermination, vengeance, jalousie et parfois amour sincère constituent le sel de l’existence pour les puissants comme pour les faibles. Un sel souvent pimenté de magie noire, la meilleure, du moins la plus apte à générer la tragédie. Une profusion de porphyre, de lapis-lazuli, d’onyx rutile sur les façades et les dômes des palais cyclopéens pendant que l’encens sature un air où l’on sent toutefois affleurer les relents de la charogne. On est dans le trop-plein, la démesure, la sensualité exacerbée, la plus totale décadence... L’orgueil précède la chute ?

Dans une familiarité teintée de crainte, l’humanité côtoie des animaux doués de parole, des créatures monstrueuses – dragons et autres chimères enchantées – et une multitude de démons en goguette. Attirés par les activités humaines, par l’hubrys des souverains, Drin, Eshva et Vazdru se jouent des passions et des désirs, récompensant ceux-ci souvent bien cruellement. Parmi eux, Ajrarn est le plus rusé. Il n’usurpe pas son titre de Prince des princes parmi les démons et de protégé de Tanith Lee, un traitement de faveur qui lui vaut même d’être ressuscité.

 

Organisé comme une série de contes enchâssés dans une trame générale, « Le Maître des Ténèbres » permet de lier connaissance avec le préféré de Tanith Lee. Mais ce grand seigneur parmi les démons ne se contente pas d’apparaître dans ce seul livre. Il se manifeste dans les autres volets du cycle, au point même de ravir la vedette aux autres princes démons. Rien ne réjouit davantage Ajrarn que de briser, par simple caprice, la destinée des mortels, modestes comme puissants. Et s’il ne peut obtenir ce qu’il désire, il le détruit. On suit ainsi quelques-uns de ses méfaits, plus ou moins captivé par les descriptions et les intrigues. Adoptant un orphelin de mortel, Ajrarn le fait élever dans sa cité souterraine de Druhim Vanashta, avant d’en faire son amant. Ayant eu connaissance de ses origines, le jeune homme est irrésistiblement attiré par la surface du monde. Ajrarn multiplie les artifices pour le détourner de ce tropisme avant finalement de lui céder, accordant une journée de liberté auprès des siens. Jalousie, vengeance, tout cela se termine évidemment très mal.

 

Le second conte est un récit classique de collier ensorcelé semant la convoitise, la discorde et la mort pour le plus grand plaisir du seigneur démon. Lui succède une histoire d’amour sans véritable éclat puis à nouveau un récit de vengeance, certes plus copieux puisque se poursuivant sur plusieurs générations (un procédé récurrent dans Le Dit de la Terre plate). Là encore, le rendu de l’atmosphère et l’écriture somptueuse font oublier la banalité des ressorts et la platitude des personnages, sagement cantonnés dans leur statut d’archétype. La troisième et dernière partie vient heureusement rehausser l’ensemble. Intitulé « L’attrait du monde », ce dernier conte s’avère plus convaincant, même si très prévisible dans son déroulement. L’histoire révèle une facette inédite du prince démon : sa faculté au sacrifice, certes un peu tempérée par son besoin de l’humanité, à l’instar de l’araignée et de la mouche. Au final, l’impression de lire un ouvrage composite et un peu répétitif l’emporte, malgré toute la bonne volonté déployée. Que nous réserve le livre suivant : du meilleur, on l’espère...

 

À la différence du volume précédent, « Le Maître de la Mort » se distingue par son statut de roman complet. Il s’agit même du plat de résistance du premier livre de la réédition Mnémos. Pour résumer sommairement l’intrigue, disons juste que l’on suit la croisade menée par un jeune hermaphrodite (changeant de sexe selon les circonstances) contre la Mort, incarnée ici dans le personnage du seigneur Uluhmé. Au fil du récit, Tanith Lee nous gratifie d’un chassé-croisé amoureux, sensuel comme il se doit. Le motif de l’immortalité, déployé ici sur plusieurs générations, avec moult digressions et micro-histoires encapsulées dans la trame générale, est animé d’une multitude de traîtres, de seconds couteaux semblant coulés dans le même moule, mais c’est la loi du conte. Récompensé par le British Fantasy Award en 1980, « Le Maître de la Mort » souffre toutefois d’un gros défaut : sa longueur. On a tendance à s’essouffler dans les tours et les détours d’un récit interminable (il pèse pourtant à peine plus de 300 pages). Bref, on reste tiraillé entre déception et insatisfaction.

 

Hélas, les choses sont loin de s’améliorer avec le volume suivant. En effet, on replonge avec « Le Maître des Illusions » dans l’ennui, même si l’entrée en scène d’un troisième larron, Chuz, prince de la folie, laisse espérer un peu de nouveauté. En fait, Tanith Lee reprend exactement les mêmes procédés que dans les deux premiers volets. Elle déroule ainsi un récit ne brillant pas vraiment par son originalité. Et ce ne sont pas les allusions à des épisodes narrés dans les romans précédents qui viennent relancer l’intérêt ou rehausser une intrigue mollassonne se cantonnant aux mêmes tours de passe-passe et ressorts. Fort heureusement, le calvaire ne dure que 160 pages, même si on a l’impression de lire le double.

 

Au terme de ce premier livre, un premier bilan s’impose. Ce qui semble constituer l’unique attrait du Dit de la Terre plate – les motifs empruntés aux contes, les procédés narratifs calqués sur Les Mille et Une Nuits, la préciosité du langage –, tous ces éléments lassent davantage qu’ils ne fascinent. On se surprend même à tourner les pages, à sauter des passages entiers, pendant que la lassitude s’installe, pesante comme un cheval mort. Reste tout de même un livre à découvrir, soit deux romans complets.

 

« La Maîtresse des Délires » pourrait être sous-titré « les amours contrariés de Ajriaz et Chuz ». En effet, le prince de la folie, contraint de fuir l’ire d’Ajrarn, le père d’Ajriaz qui l’accuse de la mort de sa femme mortelle, ne peut vivre son amour paisiblement avec la fille du Prince des princes. L’histoire évoque une vraie sitcom familiale, égayée d’à peine un conte enchâssé intéressant – un récit de cité vampire.

Les choses ne s’améliorent guère avec « Les Sortilèges de la Nuit », présenté d’emblée comme une succession de contes supplémentaires se déroulant à la même époque que « La Maîtresse des Délires ». Le procédé fleure le tirage à la ligne, pour ne pas dire le foutage de gueule, ce que confirme pleinement la lecture de ce roman inintéressant et sans éclat. À réserver aux fans hardcore du cycle, mais il faut quand même aimer perdre son temps et apprécier la guimauve.

 

 

Arrivé au terme de cette longue chronique, il faut confier le profond ennui suscité par la lecture de cette intégrale. On ne niera toutefois pas l’intérêt de la réédition de deux des romans du cycle. Mais le caractère répétitif des archétypes, le recours systématique aux ressorts du conte, la luxuriance de l’écriture éprouvent la patience et finissent par l’user.

 

Pour être plus attrayant, Le Dit de la Terre plate mérite incontestablement d’être allégé de ses toxines de surface.

 

SITE : Cafard cosmique

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29 juin 2010 2 29 /06 /juin /2010 14:01

 

Les Cités de lumière 1 : La saison de l'ombre

 

 

Encensé outre-Atlantique dès sa parution par des poids lourds du genre comme Georges R.R. Martin, Jacqueline Carey ou encore Walter Jon Williams, Daniel Abraham est passé complètement inaperçu en France. Un triste constat que l’on peut aussi bien mettre sur le dos de la surproduction actuelle que sur celui de l’immonde couverture française. Un choix éditorial étonnant quand on voit les superbes couvertures originales de Stephane Martiniere qui, à la façon d’un feu d’artifice, vous explose délicieusement les pupilles. Une manière comme une autre d’illustrer une fantasy qui vous excite les papilles. Explications...

 

Après quelques pages, force est de constater que ce premier tome des Cités de Lumières présente de nombreux point forts. Tout d’abord, il repose sur des personnages qui évitent les clichés du genre. Même les trois jeunes héros s’écartent des jeunes adolescents braves, naïfs et puceaux. Tous possèdent leur part d’ombre et vont la voir se révéler à un moment où à un autre. Et heureusement que ces personnages sont réussis puisque l’intrigue les concerne directement. Dans La Saison de L’ombre, nulles traces de batailles épiques. La fantasy de Daniel met en scène des conflits intérieurs et s’intéresse de près aux tragédies qui peuvent – ou non – en découler.

 

Si le système de magie m’a d’abord fait penser à certains mangas avec la présence de familiers, il se révèle, par la suite, unique dans son genre. En effet, ces démons sont l’incarnation des idées des poètes – les magiciens, de leurs « propres démons » : expériences passées, peurs maladives, passions refoulées, ou désirs inavoués. Ce qui n’est pas sans entraîner quelques difficultés quand votre familier connaît vos moindres faiblesses et ne cherche qu’à s’échapper de sa condition d’esclave.

 

Une fois la conclusion du récit achevée, on frémit d’impatience en attendant la sortie du second tome. Quand La Saison de L’Ombre laisse place à La Saison des Traîtres, on est en mesure d'espèrer que le meilleur reste indéniablement à venir, surtout avec une dernière phrase qui met en appétit pour la suite.

 

8/10 La prochaine fois que vous irez dans une librairie, pensez à rajouter La Saison de l’Ombre sur votre pile de bouquins. Avec ce premier tome, Daniel Abraham débute une saga de fantasy ambitieuse et réussie qui mérite un bien meilleur sort que l’anonymat dans laquelle elle est sortie en France. A lire !

 

 SITE : Librairie Critic

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29 juin 2010 2 29 /06 /juin /2010 13:54

Une gamine de seize ans, ligotée sur un matelas. Un loup qui n'existe pas. Des hommes bien trop réels, eux. Et deux flics, Vauvert et Eva Svärta, qui tournent autour des criminels, lentement, bien trop lentement.

     Et des flots de sang.

 

     Le moins qu'on puisse dire, c'est que pour son dernier roman, De fièvre et de sang, Sire Cédric ne fait pas dans la dentelle. Heu... en fait, si j'étais amateur (amatrice ?) de mauvais jeu de mots, je dirais qu'il fait plutôt dans la couture, ou plus exactement dans la découpe. La découpe soigneuse de la peau des visages des nombreuses, très nombreuses, victimes. Ce que les criminels font de ces visages, la signification de la présence des loups et la raison pour laquelle les miroirs sont brisés, ne comptez pas sur moi pour vous le dire. Vous avez 456 pages pour le découvrir, et croyez-moi, elles vont défiler vite ! Car ce roman ne se lâche pas. Il est passionnant, Sire Cédric manie à merveille l'art de l'intrigue, il sait où et quand il ne faut surtout pas laisser le lecteur faire une pause. Et il écrit de façon simple et rythmée, de telle sorte qu'on ne peut que se laisser entraîner.

 

     C'est d'ailleurs peut-être le principal défaut de ce roman : son cœur de cible est le grand public et Sire Cédric a simplifié son écriture, plus encore qu'avec L'Enfant des cimetières. Du coup, ceux de ses lecteurs qui l'apprécient particulièrement pour ses nouvelles fantastiques ciselées comme des bijoux d'argent risquent d'être déçus. Ils pourront se consoler avec la réédition de son superbe recueil, Dreamworld (aussi disponible en version audio, on fait les choses en grand au Pré aux Clercs).

 

     Le second point faible est l'exagération. Après un premier quart extraordinaire, haletant, l'intrigue retombe un peu. Vient un moment où l'on se dit qu'il y a vraiment beaucoup de sang – et du coup, ça fait moins d'effet. « Le mieux est l'ennemi du bien », dit-on, souhaitons que Sire C. s'en souvienne pour le troisième roman.

 

     Parce que bon, je l'avoue : j'attends un troisième avec impatience ! Certes, De fièvre et de sang comporte des défauts dont je vous ai fait part, en chroniqueuse consciencieuse que je suis, mais c'est surtout un énorme et savoureux moment de lecture ! Et le duo Vauvert-Svärta fonctionne vraiment bien. Et puis... ce thème de la peau découpée fait irrésistiblement penser à Angemort. Ce premier roman de Sire Cédric, paru chez Nuit d'Avril et rapidement épuisé, n'a rien à voir avec les enquêtes policières du couple de flics. N'empêche qu'un cross-over entre les deux univers... Voilà qui pourrait être amusant !
SITE : Librairie critic
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29 juin 2010 2 29 /06 /juin /2010 13:52

Une gamine de seize ans, ligotée sur un matelas. Un loup qui n'existe pas. Des hommes bien trop réels, eux. Et deux flics, Vauvert et Eva Svärta, qui tournent autour des criminels, lentement, bien trop lentement.

 

Et des flots de sang.

 

Le moins qu'on puisse dire, c'est que pour son dernier roman, De fièvre et de sang, Sire Cédric ne fait pas dans la dentelle. Heu... en fait, si j'étais amateur (amatrice ?) de mauvais jeu de mots, je dirais qu'il fait plutôt dans la couture, ou plus exactement dans la découpe. La découpe soigneuse de la peau des visages des nombreuses, très nombreuses, victimes. Ce que les criminels font de ces visages, la signification de la présence des loups et la raison pour laquelle les miroirs sont brisés, ne comptez pas sur moi pour vous le dire. Vous avez 456 pages pour le découvrir, et croyez-moi, elles vont défiler vite ! Car ce roman ne se lâche pas. Il est passionnant, Sire Cédric manie à merveille l'art de l'intrigue, il sait où et quand il ne faut surtout pas laisser le lecteur faire une pause. Et il écrit de façon simple et rythmée, de telle sorte qu'on ne peut que se laisser entraîner.

 

C'est d'ailleurs peut-être le principal défaut de ce roman : son cœur de cible est le grand public et Sire Cédric a simplifié son écriture, plus encore qu'avec L'Enfant des cimetières. Du coup, ceux de ses lecteurs qui l'apprécient particulièrement pour ses nouvelles fantastiques ciselées comme des bijoux d'argent risquent d'être déçus. Ils pourront se consoler avec la réédition de son superbe recueil, Dreamworld (aussi disponible en version audio, on fait les choses en grand au Pré aux Clercs).

 

Le second point faible est l'exagération. Après un premier quart extraordinaire, haletant, l'intrigue retombe un peu. Vient un moment où l'on se dit qu'il y a vraiment beaucoup de sang – et du coup, ça fait moins d'effet. « Le mieux est l'ennemi du bien », dit-on, souhaitons que Sire C. s'en souvienne pour le troisième roman.

 

Parce que bon, je l'avoue : j'attends un troisième avec impatience ! Certes, De fièvre et de sang comporte des défauts dont je vous ai fait part, en chroniqueuse consciencieuse que je suis, mais c'est surtout un énorme et savoureux moment de lecture ! Et le duo Vauvert-Svärta fonctionne vraiment bien. Et puis... ce thème de la peau découpée fait irrésistiblement penser à Angemort. Ce premier roman de Sire Cédric, paru chez Nuit d'Avril et rapidement épuisé, n'a rien à voir avec les enquêtes policières du couple de flics. N'empêche qu'un cross-over entre les deux univers... Voilà qui pourrait être amusant !

 

 SITE : Noosfere

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29 juin 2010 2 29 /06 /juin /2010 13:44

Anton, jeune yougoslave vivant dans un port de pêche de l’après-guerre, se lie avec un ivrogne débarqué d’un yacht occidental, ancien universitaire spécialiste de la piraterie caribéenne. Ce clochard, en échange d’un rhum infect, lui raconte une histoire fabuleuse : un pirate inconnu aurait abordé puis naufragé de nombreux bateaux et amassé un trésor gigantesque caché dans une ile déserte.

De ce pirate, on ne connaît ni le nom, ni le destin, ni la fin, mais juste un récit de jeunesse et une relation avec un étrange vaisseau. C’est suffisamment de mystères pour Anton, qui, immigré aux Etats-Unis et devenu le commandant Petrack, célèbre aventurier des mers, se relance dans sa chasse après une rencontre avec une jeune fille dont la famille poursuit les mêmes recherches depuis plusieurs générations.

 

18 ans de préparation, plusieurs années d’écriture, 1280 pages et 1,6 kg en main, il est bien difficile de résumer une œuvre si monumentale. Si le roman possède une ligne directrice forte, il aime prendre un cours sinueux, à la fois dans l’espace, dans le temps et dans la forme de la narration. Entre l’adolescence d’Anton et sa dernière aventure, l’auteur va nous entrainer dans un grand nombre de lieux et d’époques, pour des récits secondaires qui auraient pu constituer des novellas ou des romans à eux seuls. La jeunesse du pirate sans nom, véritable récit initiatique d’un enfant chef de bandes, la légende nomade, pastiche biblique des errances physiques et morales d’une tribu perdue, ou le fléau des mers, pièce de théâtre en plusieurs scènes située sur un drakkar, sont autant de morceaux d’un puzzle qui s’assemble lentement dans la tête du lecteur. Les liens entre les différentes parties, ténus et multiples, nécessitent une lecture attentive de l’œuvre (je n’ose en recommander plusieurs ... ) pour ne pas rater l’intérêt de certaines parties, lecture attentive aidée par un style impeccable, riche sans être précieux. Ajoutons à cela les réécritures de mythes religieux (l’arche de Noé) ou païens (la fontaine de jouvence) apparaissant sous diverses formes au gré du roman, et l’on comprendra la richesse du livre et son volume conséquent.

 

Bien sur, on pourra trouver trop longue telle ou telle partie, penser qu’une pièce n’apporte pas suffisamment à l’intrigue, mais rien n'est gratuit, et Jean-Claude Marguerite sait, en changeant brutalement de lieu et d’époque, relancer la machine grâce à des passages mystérieux et des scènes haletantes. Lorsque l’histoire bascule franchement dans le fantastique au bout d’un millier de pages (tout de même !) et rassemble les éléments dispersés tout au long du récit, le lecteur ne peut que tirer son chapeau à l’auteur qui a su le mener jusqu’à un huis clos final déroutant.

 

Les pirates sont décidément à l’honneur : si 2009 a été marqué par le déchronologue de Stéphane Beauverger, 2010 pourrait être l’année du Vaisseau Ardent ; deux romans radicalement différents et tout aussi réussis renouvelant la mythologie du récit d’aventure maritime.

 

SITE : Noosfere

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29 juin 2010 2 29 /06 /juin /2010 13:32

sak est un Blanc-regard, une rareté génétique qui produit des hommes plus forts, plus sauvages et plus charismatiques que les êtres humains normaux.

Vivant une vie de pauvreté, craint et méprisé par ceux qui l’entourent, il rêve d’une place dans l’armée et d’une chance de vivre sa propre vie. Mais quand l’opportunité se fait enfin jour, Isak découvre que les Dieux ont un sens de l’humour à leur mesure…

C’est une époque de vengeance, l’époque où se forgent des empires.

Critique

 

Par Gillossen, le 23/08/2007

 

Paru au printemps 2006 en Angleterre, The Stormcaller, premier roman d’un jeune auteur né en 1979, Tom Lloyd, a su s’attirer quelques belles critiques outre-Manche.

Le roman a-t-il pour autant de quoi les justifier ?

Au moins en partie, et assez aisément : dès les premières pages, on se retrouve happé dans un monde crépusculaire et brutal, ne ménageant pas le “héros”. Et, peu à peu, les pages se tournent de plus en plus vite : tout cela ne vous évoque-t-il pas quelqu’un ? Mais si, David Gemmell ! L’ombre du créateur de Druss plane souvent sur ce roman… Néanmoins, il évoque tout autant un autre grand nom britannique, plus grand encore même, Michael Moorcock. S’il n’est pas armé d’une épée buveuse d’âmes, le jeune Isak partage quelques traits de caractère non négligeables avec le célèbre Prince des Ruines.

Toutefois, en mettant de côté ces références flatteuses, l’auteur nous livre un roman maîtrisé, aux personnages et à l’univers tangibles. Si au-delà de l’aspect “mutant” des “white-eyes” celui-ci n’offre pas forcément de perspectives originales (on retrouve des elfes - différents cela dit de l’imagerie la plus classique, des dieux, de la magie en pagaille…), le tout est savamment construit, surtout dans sa seconde moitié.

Au départ, l’ombre du jeune héros appelé à une grande destinée pèse quelque peu sur les premiers chapitres. Cependant, si le roman affiche de temps à autre une note “adulescente”, l’histoire est davantage nourrie par Martin ou autres noms précédemment cités que Brooks ou Eddings.

Et si l’auteur n’a pas encore le niveau des maîtres du genre (encore que, à voir les intrigues tortueuses qu’il parvient à développer…), cette entame de cycle offre déjà des perspectives motivantes, en attendant la suite prévue pour l’an prochain… et une éventuelle publication française, qui ne saurait être oubliée !

Aujourd’hui, en juin 2010, la parution française que l’on évoquait au moment de notre critique VO (plus de trois ans séparent cette phrase de la précédente !) s’est bel et bien concrétisée, puisque c’est Orbit France qui vient de publier ce premier tome, sous le titre donné ci-dessus.

 

7.5/10


SITE : Elbakin.net

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29 juin 2010 2 29 /06 /juin /2010 13:29

Wendar est un pays déchiré. Le règne du roi Henry est contesté depuis longtemps par sa sœur Sabella qui rallie de plus en plus de nobles à sa cause. Aux luttes intestines s’ajoutent les raids meurtriers de deux races inhumaines, et ces esprits ténébreux, les Disparus, qui errent à la nuit tombée. Au cœur de cette tourmente, deux innocents doivent accomplir leur destin : Alain, un jeune homme adopté, guidé par une vision, et Liath, une jeune femme qui pourrait bien changer le cours de l’histoire. Luttant âprement pour survivre, ils sont entraînés dans une guerre aux enjeux démesurés, dont l’issue ne dépend pas de l’épée mais de la magie….

Critique

 

Par John Doe, le 20/06/2010

 

Le Dragon du roi marque l’arrivée en langue française d’un nouvel auteur américain de fantasy, Kate Elliott. Superbement illustré par Didier Graffet, il s’agit du premier livre du cycle La Couronne d’étoiles, composé au total de sept romans.

Encore une histoire d’orphelins adolescents appelés à modifier le destin du monde serait-on tenté de penser au vu de la quatrième de couverture.

Ce n’est pas tout à fait faux, mais il serait très réducteur de cantonner le roman à ce seul aspect. Serti dans un univers d’inspiration moyenâgeuse, l’auteur a manifestement pris un soin particulier à imaginer un arrière plan particulièrement bien construit, en décrivant une société rigide, dans laquelle la naissance prédomine et où le système des classes sociales est quasi imperméable.

L’aspect le plus intéressant est constitué par la prédominance de la religion : cette dernière s’insinue dans la vie de tous les jours et sert de norme, de point de repère autour duquel la vie sociale s’organise, à l’image de la société occidentale du Moyen Age. Le clergé du Wendar (le royaume dans lequel l’action se situe) possède donc, en plus de son rôle de pouvoir spirituel, un pouvoir temporel de tout premier plan. La religion majoritaire étant celle du Seigneur et de la Dame, les femmes y occupent un rôle au moins équivalent à celui des hommes.

Et qui dit pouvoir temporel dit aussi intrigues politiques. A ce niveau le lecteur est servi : arbres généalogiques complexes, magie interdite, droit d’aînesse, loi salique, bâtardise, rivalités familiales, schismes religieux, autant d’éléments qui ne manqueront pas d’évoquer pour le critique paresseux le célèbre Trône de fer de G.R.R. Martin. Kate Elliott, dans un style sans doute moins percutant, mais néanmoins efficace, parvient à conserver la maîtrise de son histoire en intégrant avec succès les enjeux collectifs aux destins individuels de ses héros.

Ils se nomment Alain, un jeune homme né de père inconnu, destiné par son père adoptif à la prêtrise et Liath, une jeune femme dotée de pouvoirs mystérieux qui se cache visiblement d’un passé tourmenté. L’orphelin victime de son destin est un archétype de la fantasy épique, mais en l’occurrence, un peu à l’image des héros de L’Arcane des épées de Tad Williams, ils vont peu à peu prendre une dimension supplémentaire et gagnent en épaisseur au fil des pages.

Autour d’eux gravitent une série de personnages secondaires, parmi lesquels ressort le prince Sanglant, fruit d’une union entre le roi Henri et une Aoi, peuple elfe craint par l’Eglise sur lequel on sait pour le moment assez peu de choses, mais qui est sans doute appelé à jouer un plus grand rôle par la suite.

On voit davantage les Eika, créatures sauvages et étranges, mi-hommes mi animaux, engagés dans un conflit ouvert avec les humains, qui se greffe à une lutte pour le trône entre le roi Henri et Sabella, sa sœur aînée.

Tout cela nous vaut donc également des scènes de combat réalistes puisqu’il est mentionné à un moment que l’un des camps est venu avec une grande armée : 800 hommes (!), ce qui nous change agréablement des chocs titanesques dans lesquels les souverains n’ont qu’à lever le petit doigt pour rassembler des armées gigantesques.

Le livre n’est bien sur pas sans défauts : la prédominance de la religion fait que certaines scènes, pleines d’un mysticisme fumeux, sont assez lourdement écrites (le personnage d’Agius). De même, la passivité de Liath et son côté « victime offerte en sacrifice aux cruautés du monde » peuvent lasser le lecteur.

Ce Dragon du roi présente au final un « bilan globalement positif », pour reprendre une formule célèbre. Si vous aimez les livres qui proposent au lecteur un univers dense, avec de la magie, des complots, des peuples non humains, des combats, des sentiments, vous devriez vous pencher sur ce cycle.

Et s’il est encore trop tôt pour affirmer que nous tenons là le premier joyau d’une série de sept, il s’agit d’un livre solide, bien construit et doté d’un potentiel suffisant pour donner envie de lire la suite.

 

7.5/10


SITE : Elbakin.net


Á la lecture de la quatrième du Dragon du Roi, difficile de relever un élément original qui ne nous donnerait pas envie de le reposer aussitôt. En effet, son résumé pourrait bien être celui d’une centaine d’autres romans de fantasy pour peu que l’on change le nom des personnages et des lieux. Et, effectivement, le premier tome de la Couronne d’Etoile croule sous les clichés : des intrigues de cours, une jeune adolescente qui possède un savoir interdit, un jeune adolescent qui veut devenir un grand guerrier, un prince bâtard mi-humain mi-on-ne-sait-pas-quoi, un roi qui se meurt d’amour, un reine qui veut devenir « calife à la place du calife », tous les archétypes du genre sont réunis pour le pire et le meilleur.

Pourtant, après la lecture de la préface, on n’est plus aussi sûr de vouloir lâcher le roman. Cette jolie entrée en matière pose une histoire certes classique mais bien racontée. La plume de Kate Rasmussen – de son vrai nom – surprend agréablement. De fait, une fois notre attention captée, on se laisse convaincre de suivre un peu plus les destinées de Liath et Alain.

Tous deux se partagent alternativement les chapitres de la première partie avant que d’autres protagonistes ne se voient confier la responsabilité « des premiers rôles » dans la seconde moitié, déployant l’intrigue vers des cercles toujours plus larges. Chahutés par les évènements, Liath et Alain sont plus spectateurs qu’acteurs de la lutte pour le trône. Venant tous deux de milieux plutôt modestes, ils n’ont pas l’autorité suffisante pour agir sur la situation. Du moins, pas au début. Toutefois, si leur passivité peut se révéler agaçante, elle est justifiée au travers de cet univers cruel et injuste où la religion punit tout ce qu’elle considère comme hérétique, où l’esclavage pousse certains à des extrémités, où les puissants ne rêvent que grimper plus haut encore sur l’échelle, peu importe le nombre de victimes et les moyens mis en œuvre pour y arriver.

On se dit alors que La Couronne des Etoiles pourrait bien faire parti de ces séries qui, si elles ne révolutionnent pas le genre, font passer un très bon moment de lecture. La suite du roman le situe quelque part entre Le Trône de Fer et L’Arcane des Epées. Du premier, il possède les intrigues politiques à foison et le lourd background historique, du second il se rapproche par son côté classique assumé mais maîtrisé.

7,5/10 S’il lui manque du caractère, Le Dragon du roi possède bien d’autres atouts pour vous charmer. De là à prétendre jouer dans la même cours que L’Arcane des Epées, seule la suite la Couronne d’Etoile nous le dira. Sachant que cette suite ne compte pas moins de six tomes.

 

SITE : Librairie Critic

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