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14 août 2013 3 14 /08 /août /2013 17:09

John Cleaver, adolescent sociopathe travaillant à ses heures perdues dans un funérarium, provoque Nobody, une entité maléfique, via le portable d’un démon qu’il a occis. A peine le gant jeté, des meurtres étranges au rituel particulièrement macabre se succèdent dans la bourgade. Aidé de sa petite amie Stacy, populaire et jolie fille du shérif, il va tenter de remonter la piste menant à l’assassin tout en redécouvrant des pans de sa personnalité qu’il pensait à jamais perdus.

 

 Ne partez pas ! Moi non plus, je n’ai pas été emballé par le résumé, m’imaginant coincé entre Twilight et le club des 5 plus de trois cents pages durant. Je me voyais même refiler l’objet à l’un de mes confrères que j’aurais préalablement poussé à la boisson… Par bonheur, en guise de référence, c’est davantage du côté du Bourbon kid qu’il faut lorgner avec des personnages épais, un humour omniprésent et l’indéniable talent qu’a l’auteur de rendre compte d’une certaine adolescence.

 

L’intrigue progresse au gré de l’initiation du héros qui se trouve enfin du bon côté de la marge, prenant le temps d’approfondir chaque relation, autant de liens qui donnent corps à cette banlieue qu’on imaginerait bien filmée par David Lynch. Et devant un tel déploiement, on occulte le fait qu’il s’agit de l’ultime pan d’une trilogie, tout à un univers qui ne saurait mieux se laisser découvrir qu’en ces délicieux moments d’abandon que permettent encore les congés payés.

 

Site : Unwalkers

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14 août 2013 3 14 /08 /août /2013 16:33

Athun est un grand roi viking, craint et respecté car nul ne peut le battre en combat singulier.

Mais Athun n’a pas d’héritier, pas de fils à qui léguer son royaume et son épée. Passant un marché avec des sorcières, il est censé trouver un petit garçon - mais au lieu de trouver un bébé, il va en trouver deux, des jumeaux…

Le premier roman de M. D. Lachlan nous fait essentiellement suivre ces deux garçons. Ils vont grandir chacun de leur côté et de façon très différente, mais le destin va surtout leur jouer bien des tours. Le destin mais aussi la volonté divine. Car à cette époque, celle des Vikings, les dieux Odin, Loki et Thor interviennent beaucoup dans les affaires des hommes.

Vali a été élevé comme le fils d’Athun et il est destiné à être son héritier. Si on lui a inculqué dès le plus jeune âge la science du combat, il a bien du mal à accepter certaines conceptions de son peuple relatives notamment à la violence et il se retrouve donc considéré comme un couard. De plus, Vali refuse de se marier à la fille du roi Fourchebarbe parce qu’il lui préfère Adisla, la fille d’un fermier. Bref, Vali n’est sans doute pas l’héritier qu’Athun attendait.

Feileg, son frère jumeau, a lui été élevé d’abord par des Berserks, puis abandonné aux loups. Sa vie n’est en rien comparable à celle de Vali. Quand le second vit dans le confort et conte fleurette aux belles demoiselles, l’autre chasse, tue et traque. Deux caractères bien différents donc, mais que le destin va pousser l’un vers l’autre ou l’un contre l’autre…

De la fantasy viking, pleine de batailles, de bruit et de fureur. Mais de la fantasy qui contient également son lot de sortilèges, de prophéties et d’intrigues de la part de dieux qui finalement s’amusent en faisant fi des hommes. Les deux héros principaux sont effectivement très éloignés l’un de l’autre, par leur caractère, leur façon de vivre et leur passé. Mais plus ils vont se rapprocher géographiquement parlant et plus les points communs vont faire leur apparition. Ils vont s’aimer, se détester, faire front commun ou se battre, se reconnaître sans savoir qui ils sont. Bref, deux destins que le lecteur suit avec énormément de plaisir.

La lecture est fluide et on se plonge vraiment dans ce monde viking à mi-chemin entre réalité et fantasy. Même si tout semble parfois « normal », le surnaturel est toujours prêt à surprendre le lecteur au détour d’un sentier. Le tout est parfaitement dosé et l’auteur sait vraiment comment happer le lecteur pour l’entraîner à la suite de ses héros. L’univers crée par Lachlan se veut réaliste et ancré dans une certaine historicité. Les personnages secondaires eux aussi sont parfaitement dépeints : leur présence illumine le roman, à tel point parfois que l’on aimerait les suivre davantage.

Le roman se révèle construit comme un immense puzzle dont on ne comprend le dessein qu’à la toute fin. Les pièces s’emboîtent petit à petit et on se rend compte que les humains ne sont que peu de choses entre les mains des dieux, sacrifiés sans le moindre remords. On se prend à les apprécier, tous, pauvres créatures qu’ils sont : que ce soit Bodvar Bjarki le Berserk, pourtant une brute invétérée et sanguinaire, ou la belle Adisla, tous demeurent soumis à leur destin. Rajoutez à tout ça un loup-garou qui est sans doute l’un des plus réussis qui soit et vous comprendrez que La Rune du loup se lit avec beaucoup de plaisir, gardant le lecteur en haleine du début à la fin.

Une bonne surprise piochée par J’ai lu, alors que l’on pensait le roman oublié des éditeurs français.

 

Site : Elbakin

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14 août 2013 3 14 /08 /août /2013 16:17

Petete est camé. Il est aussi trop paranoïaque tandis que son acolyte, Gringalet, ne l’est sans doute pas assez. Ce n’est en tout cas pas la perspective de se retrouver avec les flics aux trousses qui l’a empêché de fracasser le crâne du pauvre caissier de la station-service qu’ils ont voulu braquer. Manque de chance, la même nuit, une bombe a explosé dans une banque et la ville est bouclée par la police et Petete et le Gringalet sont coincés dans les rues de Saint-Jacques de Compostelle.

 

On avait complètement raté Land Rover, du même auteur, publié aussi chez Rivages il y a quelques années et c’est donc une surprise que nous a réservé cette Ambulance, ou plutôt cette déambulation dans les rues de Santiago de Compostela avec un Petete dont, a priori, on ne rechercherait pas la compagnie. Parano, donc, looser aigri aimant à laisser divaguer ses pensées vibrantes d’ignorance crasse et de bêtise ordinaire, le personnage principal du roman, s’il peut fugacement faire pitié, a tôt fait d’éveiller chez le lecteur une sorte de légère indulgence amusée qui finit par se transformer en antipathie tant Petete révèle une personnalité égoïste, lâche et acrimonieuse. Plus proche du Gollum du Seigneur des anneaux que de mère Theresa, il exerce clairement sur le lecteur cette combinaison de fascination et de répulsion.

 

Et il faut bien dire que ceux qui gravitent autour de Petete, son complice comme le flic ripoux à sa poursuite ou le truand censé l’aider, ne relèvent pas le niveau et ne vont pas capter le capital d’empathie du public.

 

Mariant l’humour noir à cette cavale pathétique, Suso de Toro réussit, malgré le faible potentiel à provoquer sympathie ou empathie de ses personnages, à brosser en moins de deux cents pages poisseuses un roman malgré tout fascinant qui continue, comme un vieux chewing gum, à vous coller aux semelles après qu'on l'a lu. Une expérience de lecture que l’on ne renouvellerait pas forcément tous les jours mais vraiment singulière.

 

Site : Encore du noir

 


 

 

Suso de Toro est un auteur espagnol très discret. Du moins en France où Ambulance vient de sortir chez Rivages. Seul un autre titre Land Rover avait été traduit auparavant.

 

Le polar nous a habitué à croiser la route de paumés, de perdants parfois pathétiques, parfois flamboyants. Petete et Gringalet sont de la famille des pathétiques. Le jour même où ils sortent de prison ils attaquent une station service avec un flingue non chargé mais tuent le gardien d’un coup de barre de fer. Pas très malin. Manque de chance, au même moment, une bombe explose dans une banque de la ville. Tous les accès sont bloqués par les flics, et Petete c’est fait une entorse. Les voilà coincés dans Saint-Jacques de Compostelle grouillante de flics. Sans amis, sans argent et sans endroit où se réfugier. La suite était « courue d’avance ».

 

« C’était couru d’avance », c’est le titre de trois des sept chapitres du roman. Et c’est vrai que les deux zigotos sont tellement pitoyables, bas de front et, pour couronner le tout, malchanceux, que la fin était inévitable …

 

Une dérive au gré de la douleur de la cheville de Petete, de ses choix tous plus catastrophiques les uns que les autres. Au gré de ses monologues aigris et geignards. Au gré aussi de la traque menée par un flic asthmatique, ripoux et méchant comme une teigne. Presque aussi bête que méchant d’ailleurs. Le lecteur oscille entre un léger sourire (jaune, mais sourire) devant l’avalanche d’emmerde et la stupidité des réflexions de Petete, et une pitié tintée de dégoût, ou pour le moins de mépris.

 

Ils sont tous affreux, sales et méchants, il pleut sur Saint Jacques, les témoins sont mesquins … Bref il n’y a rien ni personne à sauver, sauf un brave corniaud. Une vraie pépite noire au goût bien acidulé.

 

SITE : Actu du noir

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14 août 2013 3 14 /08 /août /2013 16:02

En pleine guerre civile libyenne, un groupe disparate – un archéologue, un pilote de chasse dont l’appareil a été abattu, une femme enceinte, un médecin anglais alcoolique, une actrice de théâtre, un réfugié tchadien, un enseignant opposant à Kadhafi et un banquier – tente de fuir Tripoli et de rejoindre la frontière tunisienne. Mais tout le monde n’est pas forcément ce qu’il paraît, chacun à quelque chose à cacher et les embuches s’accumulent.

 

Huis-clos, dans une voiture d’abord, dans un hôtel en ruines ensuite, de facture classique, Libyan Exodus tire une grande part de son intérêt du fait qu’il est un des premiers romans (avec deux SAS de Gérard de Villiers) à mettre en scène la guerre en Libye, fut-ce de manière finalement marginale. Il n’en demeure pas moins qu’à travers les destinées de ses huit personnages, Tito Topin nous dresse en creux un portrait partiel mais intéressant de la société libyenne d’avant la révolution et nous livre quelques explications sur les graines de la révolte.

 

Surtout, il met en place, comme il est de coutume dans ce genre de huis-clos, des relations entre les personnages qui permettent de révéler la complexité des relations, des engagements et, plus généralement, de la nature humaine. Si les ressorts dramatiques demeurent sans surprise, ils sont néanmoins parfaitement maîtrisés, rendant le roman fluide et captivant.

 

Comme on n’est pas à une contradiction près, on regrettera toutefois une présentation parfois un peu rapide des personnages et de leurs histoires respectives tout en saluant la relative brièveté du roman (un peu plus de 200 pages) qui lui confère un rythme agréable et évite longueurs et lourdeurs. Bref, voilà de quoi passer intelligemment et agréablement quelques heures de lecture.

 

Site : Encore du noir

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14 août 2013 3 14 /08 /août /2013 15:58

Pas encore remis de l’affaire Novella sur laquelle il a précédemment enquêté (dans Dernier shoot pour l’enfer), Julian Milner se trouve entraîné dans une autre enquête autour du sport business, dans le milieu cycliste cette fois. Une affaire dans laquelle il est d’autant plus impliqué qu’elle touche son propre frère, agressé alors qu’il menait une enquête journalistique en banlieue parisienne.

 

 Dernier shoot pour l’enfer, premier roman mettant en scène Julian Milner, laissait à penser que Ludo Sterman n’en avait pas fini avec son personnage et que l’on finirait par le retrouver. Le revoilà donc, ce journaliste sportif fils d’un père républicain irlandais qu’il n’a jamais connu, confronté cette fois aux sales dessous du cyclisme, mais aussi à l’ombre de son père qui plane au-dessus de sa famille et de ce que ce dernier a pu laisser en héritage à ses enfants.

 

C’est donc, comme dans le volume précédent, à une double quête, de vérité et d’identité, que l’on se trouve confronté ici ; l’auteur mettant tout de même un peu plus l’accent que précédemment sur les interrogations existentielles de Julian Milner, personnage qui pouvait sans doute paraître un brin monolithique et d’un caractère un peu trop archétypal malgré l’originalité de sa fonction de journaliste sportif. Autant dire que ça n’est pas vraiment l’image que l’on peut se faire de prime abord du rebelle ou de l’idéaliste en quête de vérité. Têtu, égocentrique, parfois hystérique, Milner est un personnage auquel on finit par s’attacher malgré son côté souvent agaçant – qui, par ailleurs, participe peut-être à le rendre crédible. Si l’on s’intéresse encore malgré tout surtout à ses enquêtes et que l’on peine parfois à suivre ses atermoiements sentimentaux, il n’en demeure pas moins que le personnage gagne un peu plus en épaisseur et que l’auteur laisse présager d’une ou plusieurs suites qui aideront à mieux le comprendre.

 

 Mais l’élément central du roman, pour nous en tout cas, est sans nul doute cette intrigue autour du dopage dans le cyclisme. Ou, plutôt, autour de ce qui est dit ou pas par la presse à ce sujet. Il ne s’agit pas pour Ludo Sterman d’enfoncer des portes ouvertes depuis longtemps à coup de scandales à répétition, et ce n’est pas lui qui nous apprendra que les coureurs sont chargés comme des mules. S’il nous montre les mécanismes du dopage, les divers degrés d’implication des coureurs, entraineurs, sponsors… et les collusions qui se créent avec certains groupes mafieux, Sterman nous parle plutôt de la disparition du journalisme sportif d’investigation, de la façon dont la révolution de l’internet, la nécessité du buzz permanent et de l’alimentation constante des sites en informations nouvelles, entrainent l’impossibilité de mener de véritables enquêtes de terrain dans les médias traditionnels[1]. Si le journalisme sportif est plus que d’autres, et surtout plus visiblement que d’autres, liés étroitement aux intérêts économiques des sponsors sportifs qui sont aussi clients publicitaires des journaux, il n’en demeure pas moins que c’est l’ensemble du journalisme qui flirte aujourd’hui avec cette dérive ; et c’est ce que montre encore une fois un Ludo Sterman qui connait de toute évidence son sujet et sait le rendre passionnant.

 

Il ressort de tout cela une lecture agréable, parfois un peu parasitée par la tendance à l’emphase du personnage principal – même si cela fait partie en fin de compte de son caractère – mais aussi instructive et originale. Si l’on y ajoute un propos à la fois nuancé et sans concession sur le sport professionnel et la décrépitude de la presse, on peut dire que l’on se trouve face à un roman tout ce qu’il y a de recommandable.

 

Site : Encore du noir

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14 août 2013 3 14 /08 /août /2013 15:53

Ici, en Métropole, nous avons toujours l'habitude de penser la France en termes unifiés. Évidemment, il y a quelques sans-papiers, des gens qui vivent de peu mais dans l'ensemble nous nous voyons comme l'incarnation de l'Occident moderniste. Et pourtant, ce que certains avaient qualifié de miettes de l'empire sont également des territoires français. À ce titre, la Guyane a le droit d'avoir des lois, des médecins légistes, des gendarmes, etc. Tout le roman de Colin Niel, Les Hamacs de carton, consiste à nous présenter cet univers à la fois français et exotique, dans ses aspirations et ses contradictions. Bien entendu, lorsqu'un crime est perpétré, la police enquête mais ses méthodes, les raccourcis qu'elle prend, et la façon dont elle résout les problèmes rencontrés joue aussi avec les particularismes locaux. Par exemple, si quelqu'un des villages reculés se suicide, il risque de perdre la considération des autres indigènes, aussi le gendarme doit faire preuve de beaucoup de lucidité pour arriver à opérer une distinction entre la réalité têtue des faits et leur conséquence pour la vie de la famille de la victime. Plus anecdotique, mais rendant le roman vivant, lorsqu'il montre le travail d'un garagiste à Cayenne, Colin Niel présente un homme plus occupé à réparer des moteurs de bateaux pour les orpailleurs que concentré sur des véhicules automobiles. De fait, c'est tout le travail policier qui est différent, car envie, désirs et mobiles sont différents de la réalité métropolitaine et Anato, le gendarme chargé d'enquêter, s'en rend compte assez vite...

 

En installant son intrigue autour de trois crimes : la mort suspecte dune famille dans une case au fond de l'Amazonie, la chute étrange d'une fonctionnaire française coureuse de fond, et l'assassinat d'une jeune fille sans histoire, Colin Niel balaie ainsi (avec une série de flashbacks sur la genèse d'une des affaires) la société guyanaise des petites gens des villes et des campagnes, les rapports entre métropolitains et indigènes (symbolisés par l'itinéraire personnel d'Anato, qui a toujours vécu à Paris mais a choisi de travailler sur le sol de ses "ancêtres"), l'exotisme des situations. Il montre l'absurdité de l'application automatique de lois conçues pour l'Europe et appliqués sans intelligence, à l'instar des hamacs de carton du titre qui sont en fait les dossiers de naturalisation de gens nés sur le sol français mais dont l'état-civil n'est pas très clair. Au final, à travers une intrigue de forme classique qui sait montrer de manière vivante les particularismes locaux, à travers des descriptions qui rendent crédibles et visibles la vie lointaine de nos anciennes colonies, Les Hamacs de carton ouvre une série à venir de bien belle façon.

 

Site : K-libre

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14 août 2013 3 14 /08 /août /2013 15:46

et excellent roman de suspense s’inscrit dans la grande tradition des thrillers anglo-saxons, de John Verdon à Casey Hill, en passant par Karin Slaughter... et quelques autres : celle des flics enquêtant sur un tueur en série. Encore qu’ici, comme nous le verrons, la question d’un tueur unique ou d’une bande organisée va très vite se poser, puisque l’intrigue va se jouer aussi sur cette question.

 

Quoi qu’il en soit, cette tradition a également influencé des auteurs français, ou plus généralement européens, depuis Bernard Minier jusqu’à Sebastian Fitzek ou Jussi Adler-Olsen. Or, même si la recette de ce type de thriller semble simple, elle ne doit pas être si facile à mettre en œuvre, car on ne compte pas les tentatives avortées ou donnant des résultats médiocres. Quels en sont les ingrédients de base et comment James Hayman les applique-t-il à son roman ?

 

En tout premier lieu, il faut un assassin qui soit à la hauteur. Celui-ci doit répondre à une double exigence : être totalement allumé, comme tout bon tueur en série qui se respecte, mais aussi – et surtout – exceptionnellement intelligent. Ce dernier point est vital pour que notre détraqué donne du fil à retordre aux flics qui le pourchassent. Ainsi, nos enquêteurs, reprenant à leur compte le célèbre vers de Corneille « à vaincre sans péril on triomphe sans gloire », pourront démontrer aux lecteurs l’étendue de leurs qualités humaines et de leur compétence professionnelle.

 

Après le tueur, le flic, où plutôt LES flics. En effet, il est préférable d’avoir un couple d’enquêteurs plutôt qu’un flic solitaire. Mais là encore, il ne faut pas faire n’importe quoi : des limiers de sexe différent sont conseillés, une bonne histoire d’amour, où à la rigueur de sexe, pouvant pimenter agréablement la sauce. Hayman échappe à ce poncif avec ses deux personnages principaux : Michael McCabe et Maggie Savage.

 

Le premier, inspecteur talentueux heureusement pourvu d’une mémoire eidétique, est passé en dix ans de la fonction de patrouilleur à celle de chef du service des homicides d’un district de New York. Il exerce maintenant dans l’état du Maine, ou il vit une histoire d’amour heureuse avec Kira, une artiste peintre, et il est aussi le papa attentionné d’une petite fille, Casey.

 

La deuxième, sa compétente coéquipière Maggie Savage, semble plus ou moins amoureuse de lui. Mais nous comprenons vite qu’entre eux rien ne se passera, même s’ils s’apprécient.

 

Les deux ingrédients de base (flics et tueur) étant donnés, les sauces peuvent être diverses. La plus utilisée dans les thrillers contemporains consiste à introduire dans l’histoire un individu que nos héros doivent tirer des griffes perverses du tueur, de préférence avant qu’il ne soit salement occis. La personne idéale à sauver est tout naturellement un enfant. Quoi de mieux pour susciter chez le lecteur une compassion maximale ?

 

Si aucun enfant n’est disponible dans le stock de l’auteur, une toute jeune fille fragile et sensible, ou à la rigueur une jeune maman sont à envisager. À éviter absolument : un macho antipathique et rouleur de mécanique, vis-à-vis de qui le lecteur n’éprouverait aucune empathie. Rassurez-vous : James Hayman ne tombe pas dans ce piège grossier !

 

Comme la qualité du résultat dépend du talent de chaque auteur et des épices qu’il va choisir, nous pouvons nous demander ce que nous propose d’original l’auteur de Donne-moi ton cœur, qui pourrait le différencier (en mieux) de certains de ses collègues.

 

Tout d’abord, ses personnages ont une épaisseur indéniable et évitent les caricatures. James Hayman se révèle aussi particulièrement doué pour croquer les lieux, les situations ainsi que les personnages n’ayant qu’un rôle secondaire, ce qui lui permet de rendre son histoire plaisante et rend la lecture du roman particulièrement attrayante. De plus, les détails qui permettent la progression de l’enquête sont soigneusement travaillés, un peu à la manière d’un Michael Connelly ou d’un Hennig Mankell. Rien n’est laissé au hasard et l’ensemble donne l’impression d’une mécanique bien huilée, le lecteur progressant dans sa compréhension des différentes pistes au rythme des enquêteurs.

 

L’intrigue, si elle est solidement construite, est sans surprise notable : d’ailleurs sur ce plan, est-il encore possible pour un auteur de surprendre ses lecteurs ? Sans doute pas, tellement les pires situations semblent déjà avoir été imaginées ! Mais ici le talent de l’auteur pour la mettre en œuvre, décrire les situations et accrocher le lecteur à ses personnages est incontestable.

 

L’enquête : au départ, le corps d’une jeune fille de seize ans est retrouvé sur un terrain vague, et son cœur a été prélevé chirurgicalement. Une autre jeune femme disparait et la présomption est grande que le même tueur soit à l’origine de l’enlèvement. Premier élément de suspense : cette deuxième jeune femme doit être retrouvée avant que le ou les tueurs ne prélève (nt) son cœur.

 

Le tueur a visiblement d’excellentes connaissances médicales : prélève-t-il le cœur pour pratiquer des greffes illégales et sauvages (avec la complicité de toute une équipe médicale) ou bien s’agit-il d’un tueur en série ? À moins qu’il ne s’agisse... d’un mélange des deux ? Cette question, qui reste longtemps en suspens, est un des points forts du livre et la solution trouvée par l’auteur évite, là aussi, les clichés de bien des romans du genre.

 

Au total, James Hayman, qui signe là son premier roman, a réussi un coup de maitre. Ce Donne-moi ton cœur nous révèle un auteur de talent, que nous devrons suivre avec toute l’attention qu’il mérite.

 

Site : Blog mediapart

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14 août 2013 3 14 /08 /août /2013 15:39

New-yorkais natif du Queens, Harry Bloch est écrivain. Pas de ceux qu'ont trouve dans les listes de best-sellers, ou qu'on invite dans les milieux intellos. Autrefois, quand il vivait avec Jane, Harry imaginait une carrière sous le signe de la poésie. En attendant, il signait des chroniques dans un magazine porno, d'improbables conseils aux lecteurs. Jane étant partie voguer dans les sphères de l'édition, et Internet ayant supplanté les publications pornos, Harry devint auteur de romans populaires. Sous pseudonyme, il a écrit une série de SF, puis des polars ayant pour héros un détective afro-américain dans les quartiers sensibles. Des romans alimentaires, lui permettant de vivre décemment, sans plus. C'est avec ses histoires mêlant érotisme et vampires qu'il connaît un modeste succès. Ils sont signés Sybilline Lorindo-Gold, du nom de sa mère. Harry visualise mal le lectorat d'adultes appréciant ses élucubrations vampiresques, l'essentiel étant que ça se vende.

 

Claire Nash est une ado pragmatique, d'une riche famille de la ville. Grâce à elle, Harry a gagné un peu d'argent en rédigeant les devoirs de ses amis étudiants. Maintenant, Claire est son associée, son agent officieux qui peut faire appel aux meilleurs avocats de New York. Harry reçoit une proposition d'un détenu de Sing Sing. Pas n'importe lequel, le tueur en série Darian Gray. Celui qui a été condamné à mort pour le meurtre de quatre femmes. Il les photographiait, avant de les démembrer. On n'a jamais retrouvé leurs têtes. Gray passe pour un type limité. La preuve, il adore les anciens écrits pornos d'Harry. Il reçoit un abondant courrier d'admiratrices. La mission de l'écrivain serait de rencontrer ces femmes, et de rédiger des histoires pornos à leur sujet afin que Gray puisse mieux fantasmer. En échange, le tueur livrera des révélations exclusives sur ses crimes. Claire imagine déjà la fortune que peut rapporter ce genre de bouquin, la gloire assurée.

 

Ayant rencontré Clay, Harry hésite. Il a croisé les proches de trois des victimes, qui ont eu vent du projet. Moralement, l'écrivain sait que l'idée est discutable. Mais Dani Giancarlo, sœur jumelle de la quatrième victime, strip-teaseuse cultivée, l'incite à accepter. L'avocate de Clay, et son assistante Theresa Trio (lectrice des romans de vampire d'Harry), semblent modérément approuver. Leur client doit être exécuté dans quelques semaines, mais elles espèrent un recours. Malgré tout, Harry se rend chez les fans de Gray, afin de les interviewer. Morgan Chase est une femme aussi frustrée qu'intelligente, Marie Fontaine est une jeune sataniste excitée, Sandra Dawson est une pure masochiste. Du matériel pour écrire de beaux scénarios pornos, contre des confidences de Gray sur sa vie et son œuvre criminelle. La situation se complique sévèrement pour Harry, quand on s'attaque aux trois femmes avec lesquelles il a eu un entretien. De quoi être suspecté par la police.

 

Townes, l'agent du FBI qui arrêta Clay dix ans plus tôt, attend la retraite pour écrire son propre best-seller sur l'affaire. Il harcèle quelque peu Harry, mais la jeune Claire intervient avec l'avocat de sa puissante famille. Désormais, l'avocate Carol Flosky et Theresa Trio ont des chances d'obtenir une révision du procès de Clay. Devenu intime avec Dani, malgré la jalousie de Claire, Harry tente de jouer au détective, aidé de ses deux amies. C'est aller droit vers le danger, sans la moindre garantie de découvrir une parcelle de vérité...

À la lecture de ce résumé personnel, on peut se dire l'auteur raconte là une histoire assez réussie, pas moins intéressante qu'une autre, sans excès d'originalité. Peut-être parce qu'est occulté dans ce survol n'abordant que l'aspect suspense, le véritable fond du roman de David Gordon. C'est un hommage aux artisans de la littérature populaire. À tous ceux qui, d'Edgar Poe jusqu'à Simenon, en passant par Agatha Christie ou Dashiell Hammett et bien d'autres, ont écrit des romans policiers. Sans que ça nuise au récit, bien au contraire, l'auteur nous livre sa réflexion sur ce genre littéraire. Sur la fonction sociale et l'intention du romancier populaire, sur la construction d'une intrigue, sur l'attente des lecteurs et le rapport de l'auteur avec son lectorat. À travers le parcours du narrateur, ayant connu plus de déboires que d'honneurs, on retrouve le sort de tous ces bons écrivains (tel un David Goodis, par exemple) longtemps si peu reconnus par les élites culturelles. Si David Gordon y associe des bonnes séries télé, on sent un respect certain pour ces auteurs de polars.

 

D'ailleurs, comme une preuve, des extraits de supposés livres d'Harry Bloch (science-fiction, enquête de détective, sexe et vampires) sont insérés dans ce roman. David Gordon n'écrit pas selon le principe béhavioriste, qui veut que le récit s'en tienne aux faits, sans exprimer les états d'âmes des protagonistes. Néanmoins, il connaît ses classiques : “Pour tout vous dire, je préfère le suspense à l'ancienne, avec un assassin qui meurt à la dernière page, sans détails à l'eau de rose sur la vie privée du héros. Quand un détective apprend qu'il a une tumeur, ou que des terroristes ont enlevé sa femme, je me dis que la série est sur le déclin, ou que l'auteur est au bord du gouffre. Arrêtez de nous emmerder avec vos problèmes personnels. Faites votre boulot, un point c'est tout. Dans ses premiers romans, Dashiell Hammett, le maître de la vieille école en personne, ne s'embêtait pas à donner un nom à son détective. Le narrateur n'était qu'un type un peu courtaud avec un flingue et un chapeau, qui fumait trop de Fatimas. Il débarquait en ville dans un costume froissé, résolvait l'affaire et repartait par le train suivant...”

 

On souligne également ici la fascination qu'exerce sur le public (souvent féminin) les plus cruels tueurs en série, et la même admiration glauque envers les histoires érotiques extrêmes (parfois sataniques). Toutefois, ceci n'a rien d'une thèse sur ces questions. C'est une fiction, jouant (non sans ironie) sur l'idée commerciale du concept “inspiré de faits réels”. Non, ce qui est proche du “vrai”, ce sont quelques-uns des portraits. Dont celui de Jane, belle arriviste du monde artistique; celui de Claire, trop lucide gosse de riche qui retrouvera un peu plus d'humanité; ou celui de Theresa, dure contre l'injustice et lectrice émue des œuvrettes du héros. Quant à l'intrigue, comme il se doit, elle est pleine de rebondissements agités, même quand on croit le dénouement arrivé. “Polarama” est un régal, à tous points de vue. Les passionnés de littérature policière ne s'y tromperont pas.

 

Site : Action suspens

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L'écriture est bonne et les phrases font mouche! On se marre et on frissonne en même temps! On tourne les pages encore et encore pour connaître la suite. A la fois grave et drôle. Entre descriptions de scènes d'horreur, confidence sur l'oreiller et scènes cocasses.

Mais David Gordon ne s'arrête pas là! Non! Entre les lignes (parfois même très lisiblement hein!) il nous parle de son amour pour la littérature policière. Les "vrais" romans policier. Ses auteurs fetish, comme Dashiell Hammett ou Edgar Allan Poe. Il parle aussi du rapport entre l'écrivain et le lecteur, nous offre sa vision des choses. Il dénonce aussi d'une certaine façon, la fascination morbide qu'exerce les serial killer aux USA. Ces tueurs devenus des mega stars.

 

La fin arrive et reste dans la ligné du livre, elle ne déçoit pas, bien qu'elle soit assez triste à mon goût. Elle annonce peut-être (PEUT-ÊTRE!!) une suite...??

En tout cas, si suite il y a, preneur je suis!!

 

En bref, "Polarama" est un polar incontestablement hors norme. Entre pornographie, viscères, humour, amourette et écrivain raté. En un mot: GÉNIAL !!

Foncez, vous allez vous régaler !!!

 

Site : serial lecteur


 

 

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14 août 2013 3 14 /08 /août /2013 15:30

J’ai été captivé par le nouveau roman de Johan Heliot, à la fois érudit, palpitant et sensible. L’intrigue, riche sur le plan historique et scientifique, est portée par un suspense permanent et des personnages attachants. Passé maître dans l’art de l’Uchronie, après avoir connu un grand succès avec la Trilogie de la Lune, cet auteur talentueux, élabore ici une réalité dans laquelle un régime militaire, dirigé par le Général de Gaulle a permis à la France de s’imposer comme leader sur la scène politique internationale. C’est en devançant Russes et Américains dans le développement des technologies nucléaires que notre pays serait devenu le pionnier de la conquête spatiale et la première puissance du globe. Une hypothèse fascinante qui redessine la géopolitique mondiale, permettant à l’auteur d’explorer tous les travers d’un régime dictatorial, impérialiste, de rappeler par échos la réelle tension critique des années 68 et la difficile, cruelle et douloureuse décolonisation de l’Algérie. En artiste confirmé, Johan Heliot esquisse ce récit à travers le regard d’un narrateur humain et touchant. Vincent est un photo-reporter à la fois courageux et tourmenté. Un personnage écorché-vif par une enfance difficile sur la base spatiale Hamaguir du désert algérien. Les révélations sur le passé mystérieux du héros et son rôle dans les événements dramatiques qui secouent le monde sont distillées avec brio. Les flashbacks en cascade sont d’une poésie tour à tour dramatique et lumineuse. L’auteur sait le ton juste pour inspirer les émotions les plus intenses comme les plus subtiles. Ce roman ambitieux sur le plan historique, politique, scientifique et social est aussi une aventure, menée tambour battant. Les pages défilent à grande vitesse. Cerise sur le gâteau pour les amateurs de science-fiction et d’imaginaire au sens large, l’intrigue aborde un autre versant du réel sur lequel il serait maladroit de déflorer le mystère. Françatome est une œuvre dense, enrichissante, pénétrante et mélancolique, servie par un style limpide. A mon avis, une très grande réussite !

 

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14 août 2013 3 14 /08 /août /2013 15:23

Rue Farfadet’ de Raphaël Albert est un enchantement obscur, une sublime alliance de polar et de Fantasy. Sylvo Sylvain, elfe, détective privé, âme tourmentée, créature des forêts, déracinée, personnage hautement cynique qui noie son quotidien dans des affaires de mœurs sordides. Séducteur invétéré, alcoolique notoire, il sombre lentement dans la décadence rongé par les remords et la solitude de l’exil. Le héros est ainsi, planté, sensible et plongé dans l’autodestruction. Mais, il nous faut maintenant parler du décor de cette aventure palpitante de bout en bout. Vous allez découvrir Panam (Paris dans les années 1880), capitale industrielle sombre, envoûtante et mélancolique, envahie par les nains, les magiciens, les élémentaires, les ondines, les orques et les gobelins. Fable piquante d’ironie, métaphore sociale et politique, ‘Rue Farfadet’ évoque de nombreux thèmes philosophiques tels que le racisme et la lutte des classes. C’est aussi l’histoire d’une grande conspiration terroriste qui transpercera le cœur du héros et le conduira des bas-fonds aux affaires ducales. Sortilèges dévastateurs, trolls terrifiants, attentats, magie de bataille, l’action est au rendez-vous. Un récit haletant et très poétique, baudelairien, teinté de spleen et d’idéal. Un style efficace, une histoire rythmée foisonnantes de détails féeriques. Du grand Steampunk à la française. Motos à vapeur et chauffeurs de taxi centaures vous attendent, plongez-vous dans le Panam de la rue Farfadet.

 

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